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400 ans de séparation

Le grand écart entre compositeurs du passé et compositeurs du présent est une grande habitude. La confrontation des madrigaux existe ainsi depuis que ce répertoire ancien a été ressuscité à la fin du XIXe. Daniel D'Adamo livre sa vision du madrigal, cette forme libre linéaire inféodée au texte, sur des poèmes de Sanguinetti, Pasolini ou Ungaretti, face à ceux de , compositeur encore mal connu, à la croisée des chemins entre Monteverdi et Gesualdo, dont les extraits choisis sont sur des textes de Rinuccini et de lui-même.

Point d'hommage au passé, point de copie, Daniel D'Adamo reste obstinément personnel. De D'India, il n'en a pris que l'essentiel : l'équilibre précaire entre deux langages (modal / tonal pour le plus ancien, tonal / atonal pour le plus récent), la fusion de différents styles (les influences chez D'Adamo sont diverses, de Berio et Boulez à l'école spectrale), la rhétorique figuraliste du madrigal et peut-être l'errance géographique. Parti de Palerme, a parcouru toute l'Italie du sud au nord avant d'arriver en Bavière (encore qu'aucun document n'atteste de sa présence effective à la cour de Maximilien Ier). Daniel D'Adamo est né argentin, naturalisé italien et vit en France.

Fruit d'une résidence à Royaumont en 2007, cette mise en perspective est une remarquable réussite. Les deux créateurs se font face, se répondent l'un à l'autre, sans que l'un domine l'autre. L'ensemble Poïésis (si bien nommé, la poïétique étant le processus de création de l'auteur rapport à l'œuvre) excelle dans les deux répertoires. Saluons particulièrement la performance de la flûtiste dans Cosí (D'Adamo), pièce qui n'est pas sans rappeler Artisanat furieux du Marteau sans maître. Un CD à se procurer d'urgence, tant musiques passées et présentes n'ont été si proches, si voisines, si semblables, malgré leur éloignement temporel.

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