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Bartók jazzy, et Martinů danse le charleston !

Cycle Paris Cosmopolite

Pour incarner le Paris cosmopolite des années 20, thème du cycle en cours à l'Auditorium du Musée d'Orsay, Martinů est l'homme de la situation. Compositeur tchèque installé en France de 1923 jusqu'à ce que la guerre le pousse à partir aux Etats-Unis en 1940, il est très influencé par la musique française, mais également par le madrigal anglais, le charleston ou le concerto grosso de l'époque baroque !

A peu près aussi loufoque que son opéra radiophonique Alexander Bis qui voit parler un tableau, son ballet La Revue de cuisine, composé en 1927, est un sextuor imaginatif et imagé où se nouent des drames dignes de l'antiquité mais très prosaïquement situés… à la cuisine : une Lamentation du chaudron, une Danse du Fouet à crème autour de la marmite et surtout un Duel du balai et du torchon sur un irrésistible rythme de charleston. Si l'intrigue est savoureuse, le maître queux fait monter les climats en neige et sait créer en quelques battements des ambiances grinçantes, nerveuses, ou dramatiques. Dans l'Introduction, quel est ce rythme obsédant au dessus duquel plane la trompette ? On croirait entendre un Boléro noir. Et le mouvement suivant, la Danse du Fouet ne fait que renforcer cette impression, surtout quand on a en tête l'interprétation lente et évocatrice du Boléro par le grand ravélien Pedro de Freitas Branco. La Revue de cuisine fut un grand succès populaire dès sa création, le Boléro quant à lui, allait être composé… l'année suivante. Troublante coïncidence ! L'interprétation des musiciens menés par , qui avait contribué à un disque Martinů remarqué dans nos colonnes, fut acidulée à souhait. On reprit avec plaisir, en bis, une part du Duel du balai et du torchon pour finir sur une excellente bouche.

Le reste du menu avait de quoi satisfaire les palais les plus délicats. En apéritif, un Ravel exigeant de 1922, suivi immédiatement après d'un Bartók de 1938 tour à tour envoûtant, jazzy (l'œuvre avait été commandée par le clarinettiste de jazz Benny Goodman) et dansant comme Bartók savait le faire. Avant d'attaquer le plat principal, il nous fut servi un de 1910, romantique et brahmsien à souhait, qui sans être au même niveau que les autres mets, s'appréciait sans faire de chichis. On recommande cette adresse !

Crédit photographique : © DR

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