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Peeter Cornet, génial compositeur à la croisée des styles

C'est en 1972 que l'organiste belge Jean Ferrard enregistra pour la première fois l'œuvre de sur l'orgue historique de Medemblick. Cet album, paru en microsillon chez Erato pour sa célèbre collection «l'encyclopédie de l'orgue EDO 233-4», permit alors au monde des mélomanes la découverte de ce compositeur d'exception. Depuis, quelques versions, souvent partielles, sont venues compléter une discographie encore bien timide au regard de la valeur de cet auteur. La présente parution propose une nouvelle intégrale de son œuvre, réalisée sur deux orgues historiques de tout premier plan, et dont l'esthétique correspond en tout point aux pièces proposées. Deux instruments magnifiquement restaurés par deux spécialistes du style de l'école flamande, et dont le son originel a été restitué, en particulier au travers d'une harmonie très colorée et d'un accord mésotonique, indispensables pour mettre en valeur l'écriture particulière de ces textes.

est sans nul doute l'un des plus grands de son temps, en ce début de XVIIe siècle, époque bénie des dieux, qui vit l'éclosion des plus grands livres d'orgue : Frescobaldi, Arauxo, Titelouze, Scheidt, sous l'ombre bienveillante de leur père, le génial Sweelinck. Organiste Bruxellois, Cornet, dont le nom même semblait le prédestiner à cet instrument, nous livre, parfois de manière fantasque, une œuvre d'orgue synthétisant les divers courants musicaux européens. Bruxelles étant déjà un centre culturel, les styles italien, ibérique et anglais s'y croisaient allègrement, et se retrouvent ici sous sa plume.

Une musique de contrastes, donc, de climats divers, qui se côtoient avec bonheur, rappelant le tiento espagnol, la toccata italienne, ou la fantaisie anglaise, dont il faut aller chercher l'origine chez Philips, voire Byrd.

Bruxellois lui-même, l'organiste parait entièrement familier à ces œuvres. On saisit d'emblée qu'il en exprime la quintessence, au travers d'un abord musicologique subtil : choix judicieux de registrations, touché résolument adapté au texte, doigtés «dits anciens» qui donnent tout le relief attendu, engendrant une fine et naturelle inégalisation du discours, groupant les notes par deux, révélant ainsi toute la rhétorique de l'expression baroque. On l'aura compris, cette version se hisse au plus haut niveau, soutenue par une prise de son très réussie, suffisamment rapprochée, pour ne rien laisser perdre de chaque détail de la musique et des couleurs de ces orgues d'exception.

sonne ici en gloire, pour nos oreilles et notre esprit largement contentés. Une pierre importante de l'édifice musical européen retrouve enfin sa place : indispensable.

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