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Charles Munch ardent interprète de Tchaïkovski

En haut à gauche du visuel de ce CD, il est mentionné «The Decca Records». Si cette affirmation est correcte pour la Symphonie Pathétique enregistrée par Decca du 24 au 27 mai 1948 à Paris, elle est inexacte en ce qui concerne le Concerto pour piano n°1 : Kostia Konstantinoff et Charles Munch l'ont certes gravé, mais pour la Columbia française à Paris en avril 1941 et mars 1942. Le label Archipel Records a-t-il réellement utilisé les sources originales (78 tours), comme il l'affirme, pour accomplir ses propres transferts 24 bit / 96 kHz, d'autant que les références de matrices ne sont pas renseignées ? Nous supposons que ce label a tout simplement utilisé de précédents transferts en CD pour réaliser sa propre compilation : une pratique qui est souvent l'apanage de petites labels à bon marché, dont le flirt avec le piratage est regrettable.

Il faut, malgré tout, mettre en évidence le résultat remarquable et même exceptionnel du report, vu l'âge des enregistrements originaux. La qualité sonore du Concerto pour piano est supérieure à celle de l'édition Artone-Membran trop filtrée : la netteté incisive des instruments de l'orchestre parisien est plus perceptible, grâce à un idéal équilibre aigus / basses, et un médium chaleureux, tandis qu'aucune réverbération artificielle n'a été ajoutée ; la sonorité du piano n'est que plus naturelle. Au niveau interprétatif, signalons une coupure inhabituelle dans la cadence finale du premier mouvement, sans doute nécessitée par le découpage en faces de 78 tours.

Curieusement, le son du Concerto pour piano, enregistré dans les difficultés de la guerre, est sensiblement supérieur à celui de la Symphonie Pathétique gravée six années plus tard. Il est vrai qu'en 1948, Decca ne maîtrisait pas encore entièrement la technique FFRR (Full Frequency Range Recording) qui allait bientôt faire sa réputation. Le résultat est suffisamment audible pour que l'on apprécie toutes les nuances et les enthousiasmes du grand Charles Münch. Ils sont déjà révélateurs de sa future carrière à Boston, où ses exécutions de pages de Tchaïkovski seront les plus éblouissantes : on songe notamment au Concerto pour violon, à Francesca da Rimini, Roméo et Juliette, la Sérénade pour cordes, les Symphonies n°4 et n°6.

Ce disque Archipel est idéal – et essentiel – pour appréhender ces interprétations de la première heure du grand chef d'orchestre alsacien, à la tête d'une phalange aux sonorités appropriées à la musique de Tchaïkovski.

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