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Le médecin malgré lui de Gounod, Molière lyrique

Environ tous les deux ans, la Fondation Royaumont, à l'occasion d'une de ses sessions de formation au métier de chanteur d'opéra, et l' s'associent pour réaliser et diffuser une production lyrique. En 2008-2009, il s'agit de l'opéra-bouffe Le médecin malgré lui de Gounod. Pourtant économe en moyens mais apte à voyager aisément, ce spectacle est une grande réussite.

a réalisé une mise en scène agile et spirituelle. Fuyant les perches hâbleuses que tendent les deux librettistes (Molière méritait mieux), elle a conçu un plateau nu sur lequel reposent deux objets : l'un, statique, est un lit miraculeux (si on y dort peu, on y grimpe, on y roule et saute dessus ; puis, parce qu'il est surélevé, on s'y cache dans ses trappes, situées sous le sommier) ; l'autre, mobile, est une collection d'élégantes pergolas multifonctionnelles. Alliant un rythme vif, des courses sur la pointe des pieds (jamais à pas lourds) et une expression physique empruntée au premier burlesque cinématographique, la mise en scène se complète d'une direction d'acteurs si accomplie que les chanteurs parlent les dialogues théâtraux avec une justesse digne de comédiens talentueux. Ainsi cajolé et revivifié, l'opéra-bouffe s'approche des plus raffinées comédies musicales. Le public, à commencer par le plus jeune, qui ignore le monde de l'opéra, a de quoi y prendre des marques savoureuses.

Le travail vocal est accompli, nous montrant une véritable troupe de chanteurs. À commencer par qui fait de Sganarelle un funambule lunaire et touchant : avec sa haute silhouette et son éloquente souplesse physique, il dessine un personnage ravagé par l'inquiétude de celui qui court de petites combines en vertigineux mensonges ; doté d'une tessiture longue, unie et toujours bien sonnante, il offre en outre une diction sans défaut. Faute de place, on ne détaillera pas le reste de la distribution, qui, à l'unisson, mérite d'identiques éloges.

L'autre grand maître de la soirée est . Conduisant son , il surveille avec gourmandise l'équilibre sonore entre le plateau et la fosse, sculpte l'écriture vocale spontanée de l'œuvre, révèle, sans appuyer, combien le naïf Gounod agit en admirateur de l'opéra-comique français du XVIIIe siècle plus qu'en néo-classique lorsqu'il en reprit les genres, trouve les tempi juste et fait dialoguer, avec le plateau, les solistes de l'orchestre comme s'ils jouaient, eux aussi, d'autres rôles. Du bel art !

D'ici à un an, au moins une vingtaine de représentations est prévue dans des opéras et des théâtres en France (on parie, sans grand risque, que, d'ici là, d'autres lieux allongeront cette liste). Forcément une près de chez vous !

Crédit photographique : © Élisabeth Carecchio

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