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Une soirée flamboyante avec l’Orchestre Symphonique de Navarre

L', fondé par le violoniste Pablo de Sarasate en 1879, est la plus ancienne des formations orchestrales espagnoles en activité. Après avoir accompagné Juan Diego Florez en novembre dernier au Théâtre des Champs-Elysées, ses musiciens sont de nouveau à Paris, au Châtelet, pour les représentations de Cyrano de Bergerac de Franco Alfano avec Plácido Domingo dans le rôle titre. Ce soir-là, ils étaient installés sur la scène pour ce concert plein de verve et d'enthousiasme, sous la direction de leur chef Ernest Martinez-Izquierdo, ancien assistant de Pierre Boulez au sein de l'Ensemble Intercontemporain.

Le programme haut en couleur, constitué d'œuvres composées dans le premier quart du XXe siècle, est placé sous le signe de la danse. C'est également un bel hommage aux Ballets russes : Le Tricorne et L'Oiseau du feu furent commandés par Serge de Diaghilev et créés par sa compagnie, dont la première saison parisienne se déroula il y a juste cent ans au sein de ce même théâtre.

Après La vida breve de Falla qui met d'emblée la salle dans une ambiance festive et chaleureuse, le pianiste russe offre une interprétation absolument éblouissante du Concerto n°2 de Prokofiev. Elève de Dmitri Bashkirov à Moscou, lauréat notamment du concours Tchaïkovski en 1978 et professeur à Menuhin School depuis 1990, c'est un maître, un interprète de brio, dont le nom mériterait d'être plus connu. S'il sait exprimer la douleur et l'angoisse dans le sombre Andante initial (l'œuvre fut écrite au moment où le compositeur apprit le suicide d'un ami), sa technique infaillible et parfaitement maîtrisée ne laisse rien échapper à la virtuosité spectaculaire et complexe du Scherzo et du Finale. L'orchestre, tout aussi engagé, suit le piano et lui répond pour ne plus faire qu'un avec lui.

Dans la seconde partie du concert, L'Oiseau du feu est à la fois libre et rigoureux, sauvage et ordonné, la sonorité de chaque instrument est efficacement mise en valeur sous la baguette – presque «magique» – de l'excellent . L'atmosphère chaleureuse de la salle s'accroît, le chef est rappelé à plusieurs reprises bien que le concert ne soit pas encore terminé. Les trois morceaux de la Deuxième Suite du Tricorne engendrent un resplendissant arc-en-ciel sonore ; chaque pupitre trouve son propre climat et s'épanouit pleinement. Avec les deux morceaux bissés – dont Malambo, la danse finale délibérément rythmique du ballet intitulé Estancia du compositeur argentin (1916-1983) –, l'orchestre enflamme davantage le public.

La prestation de cette soirée, constamment distinguée par les remarquables sections d'harmonie et de percussion, ainsi que par les cordes d'une grande homogénéité, prouve que l' se hisse au plus haut niveau.

Crédit photographique : © Oriol Gassó

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