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Haendel, comme jamais plus ?

A l'heure où la musique baroque semble avoir pris une vitesse de croisière irréversible, la firme Deutsche Grammophon réédite un enregistrement qui tombe comme un pavé dans la mare des baroqueux!

Une version du Serse de Haendel qui aujourd'hui ressemble à une hérésie. Alors que les musicologues dépouillent les archives de la musique avec des microscopes pour tenter de donner au public le son et la manière la plus authentique, la plus vraie, la plus «plus» d'interpréter la musique du XVIIIe siècle, voilà un coffret qui va à l'encontre de tout ce qu'on a construit pour jouer la musique baroque au plus près (croit-on) de son authenticité.

Jugez plutôt: Un grand orchestre symphonique. Des instruments actuels. Un diapason à 440 Herz. Des voix immenses. Tout pour hésiter de faire sauter la cellophane qui scelle le coffret. Horreur et anathème? Et pourtant, cet enregistrement est tout simplement superbe. Un véritable miracle qui tient à un élément majeur: la musicalité. Grâce à l'équilibre admirablement dosé entre l'orchestre et les solistes, on se prend au jeu de cette prestation en goûtant mesures après mesures la cohésion de l'ensemble.

Si la contralto s'était déjà illustrée dans Serse et Rodelinda sur les scènes viennoises, sa présence dans cet enregistrement n'est pas une surprise pour l'époque. Elle imprime au rôle-titre une présence et une noblesse majestueuse démontrant sa parfaite adaptabilité à une musique paraissant éloignée de son répertoire habituel. Plus surprenante est la présence de la soprano , qu'on sait excellente dans les opéras de Mozart ou de Strauss, et qui s'acquitte de ce rôle haendélien avec un bel aplomb. Si les autres chanteurs sont moins connus, ils n'en sont pas moins excellents eux aussi.

La remarquable direction d'orchestre de Brain Priestman colore l'œuvre du brillant de l'acier et du mordoré des cuivres. Il se dégage de son interprétation une énergie rare et communicative. Autre formidable artisan de ce splendide enregistrement, le clavecin continuo de . Parfaitement enregistré, ses interventions dégagent un swing digne des plus grands improvisateurs de la musique de jazz. Ça bouge, ça balance et c'est d'une vitalité débordante.

Un Haendel, comme jamais plus on ne le jouera? Peut-être mais, c'est bien dommage.

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