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Un fleuron de l’école d’orgue baroque rouennaise

Une nouvelle fois, nous retrouvons avec bonheur , jeune organiste russe, venue voici quelques années s'installer en France, et découvrir peu à peu cet univers fascinant de l'orgue classique français, en particulier auprès de Michel Chapuis. Elle nous a déjà gratifié de quelques enregistrements remarquables sur l'orgue de la chapelle royale de Versailles, dont elle est depuis devenue l'une des organistes. Nous avions déploré alors une prise de son trop lointaine et brouillant beaucoup son discours musical, pourtant vivant et engagé. Aujourd'hui, elle nous présente la messe de (ou Corette), père du célèbre Michel Corrette, brillant témoin de cette grande école d'orgue rouennaise, initiée au XVII° siècle par le chanoine Jehan Titelouze. Corrette est l'un des rares auteurs a avoir bâti son unique livre d'orgue sur les versets de l'ordinaire d'une messe, à l'instar de Nicolas de Grigny et François Couperin. C'est dire l'intérêt d'une telle somme, et même si l'écriture n'atteint pas toujours les sommets précédemment cités, l'ensemble conserve une belle et fière allure.

Cette messe, tout comme celle pour les couvents de Couperin, utilise la tonalité de Sol majeur (8° ton de l'époque), mais sans évocation précise à un thème de plain-chant. Les versets qui se chantent en alternance pourront être choisis chez Dumont, ou Lully. Ici l'organiste a choisi de nous livrer la messe tel que, sans plain-chant alterné, sortie de son contexte liturgique. Cela se défend très bien, en particulier grâce au choix de l'orgue de Saint-Michel-en-Thiérache est excellent. Cet instrument, contemporain de l'écriture de cette messe, est idéal pour traduire les beautés de cette musique. Il a en effet conservé en intégralité ses caractéristiques d'origine, et la dernière restauration opérée par le facteur Westenfelder fut une véritable révélation.

La prise de son est ici enfin corrigée, et équilibrée, dans une acoustique légendairement reconnu en ce lieu comme remarquable. Le jeu est rapide et vif, concertant parfois, proche des fastes de la cour. Les tempi sont enlevés y compris dans les pièces en taille, méditatives par excellence, et qui prennent ici une tournure plus optimiste et joyeuse. a depuis longtemps saisi toutes les subtilités du toucher ancien, et nous restitue cette musique dans toute sa lumière. On pourra comparer cette version avec celle parue récemment sous les doigts de Régis Allard, et se rendre compte que les approches peuvent être très diverses dans un tel répertoire. Rappellons que ce fut Jean-Albert Villard, ancien titulaire du grand Clicquot de Poitiers qui nous permis de découvrir cette œuvre au début des années 70 sur son orgue, pour la collection « l'encyclopédie de l'orgue », parue chez Erato.

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