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Gounod baroquisé, Molière romantique…

Ce qui frappe d'emblée dans ce spectacle mis en scène par , c'est son aspect dynamique et animé. En effet, dès l'ouverture orchestrale, une action évidemment muette, mais pour le moins amusante des personnages qui interviendront en chantant après la levée du rideau, accroche tout de suite le spectateur.

Pour la suite, comme l'a déjà signalé à juste titre Frank Langlois dans ces mêmes colonnes, «[] a conçu un plateau nu sur lequel reposent deux objets : l'un, statique, est un lit miraculeux (si on y dort peu, on y grimpe, on y roule et saute dessus ; puis, parce qu'il est surélevé, on s'y cache dans ses trappes, situées sous le sommier) ; l'autre, mobile, est une collection d'élégantes pergolas multifonctionnelles.» Il faut d'ailleurs préciser l'idée directrice de la mise en scène : «La rencontre de deux temps du théâtre, de deux époques, quand le naturalisme gris du XIXe siècle se laisse traverser de part en part par la volubilité baroque, la couleur de l'ivresse et du plaisir» (). Même si ce concept est un peu aménagé par la présence d'un haut-parleur typiquement XXe siècle, il reste en accord avec le sous-titre : «comédie de Molière arrangée en opéra comique par MM. Jules Barbier et Michel Carré» qui montre vraiment que Molière reste au centre de l'œuvre, avec des citations de sa pièce dans les parties parlées, les textes des parties chantées étant évidemment composées par les librettistes qui réussissent à rester dans l'esprit. La musique, elle, traduit effectivement les références à l'époque du Sieur Poquelin par des passages très «à la façon de» musiciens plus anciens. C'est la manière qu'adopte Gounod de montrer son admiration pour le théâtre lyrique français passé. La Camerata de Bourgogne et l'orchestre de Dijon, sous la baguette précise et alerte de , offre vraiment le meilleur pour commencer cette saison lyrique dijonnaise : un équilibre entre les pupitres, des attaques dynamiques et enlevées, quelques passages plus doux et intimes, des interventions d'instruments plus individualisés comme le basson, la flûte, le hautbois, etc. très réussis et surtout une joie partagée avec des instrumentistes visiblement heureux de participer à cette prestation.

Cette joie partagée et cette qualité avérée dans l'interprétation se retrouvent également chez les chanteurs-comédiens. En effet, les passages chantés, bien articulés chez la plupart des intervenants sont à mentionner, d'autant que la gaîté, le rire et l'amusement sont suscités sans peine par des chanteurs qui savent également jouer la comédie. D'ailleurs, les mimiques, les gestes, la légèreté des mouvements… se retrouvent également dans les passages parlés, soulignant les différentes sortes de comique présentes : comique de situation, de mots, de gestes et bien évidemment la satire (des médecins…). De ce fait, doivent tout de même être cités rapidement : , dans un Sganarelle tour à tour drôle et touchant avec une présence indéniablement forte, tant vocale que dramatique de même que Marie-Paule Bonnemason dans le rôle de Martine, l'épouse de ce faux médecin. incarne une Jacqueline très inspirée et s'impose également avec talent dans un rôle savoureux. Bertrand Bontoux joue un Géronte à la fois inquiet et confiant en une médecine… non conventionnelle où le cœur est à droite ! Les autres chanteurs n'ont pas démérité, loin s'en faut, que ce soit en Lucinde, en Léandre, Julien Picard en Lucas, Sacha Michon en Valère ou encore Thierry Mettetal en M. Robert.

Tous ont contribué à une soirée particulièrement réussie et saluée chaleureusement par un public conquis, charmé par une association de bienfaiteurs… du rire : Molière et Gounod !

Crédit photographique : © Élisabeth Carecchio

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