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Symphonie n°9 de Schnittke, aux confins de l’énigme

Bis progresse dans son anthologie de l'œuvre d' avec un album centré sur l'ultime de ses symphonies. En juillet 1994, le compositeur fut victime d'un accident vasculaire qui le laissa fortement diminué. Pourtant, l'artiste, limité à l'usage de sa seule main gauche put terminer différentes œuvres dont un nouveau concerto pour alto et cette neuvième symphonie.

Pourtant, la partition était très difficile à déchiffrer et différentes personnalités comme les chefs d'orchestre Gennady Rozhdestvensky ou Andrei Boreyko et le compositeur Nikolaï Korndorf tentèrent d'en donner une version exécutable. C'est le compositeur qui termina, après plusieurs années de labeur, l'édition de la partition présentée sur ce disque. Créée en juin 2007 à Dresde par l'orchestre philharmonique de Dresde et le chef Dennis Russell Davies (qui en enregistra une version pour ECM).

D'une grosse demi-heure, cette pièce témoigne du style ascétique et décharné du dernier Schnittke. La musique semble perdue dans les limbes de l'histoire de la musique avec des réminiscences de Bruckner, Prokofiev, Tchaïkovski, Mahler, Chostakovitch, Pärt, Silvestorv. La musique est décantée à l'extrême mais garde une force expressive constructive et présente de beaux moments de tensions dramatiques avec un instrumentarium qui, comme toujours, chez Schnittke, convoque le grand orchestre en tutti mais ponctue l'orchestration de touches inattendues de clavecin. dirige assez rapidement et maintient le discours actif, il évite ainsi le piège de l'enlisement et de l'ennui dans lequel Russel Davis était tombé à pieds joints…

Le concerto grosso n°1 fut composé en 1977 pour deux violons, piano préparé et orchestre à cordes. En 1988, à la demande du hautboïste russe Viacheslav Lupachev, le compositeur écrivit une transcription pour où flûte et hautbois remplacent l'orchestre à cordes. Même transcrite, la force de cette œuvre reste intacte. Evoluant aux limites des formes stylistiques du baroque, Schnittke joue sur un humour acide sur la dérision et sur une forme d'ambiguïté qui passe sans cesse du comique au tragique.

Un disque, encore important, pour nous apprendre à apprivoiser l'un des artistes les plus énigmatiques et imprévisibles de la seconde moitié du XXe siècle. On découvre également la qualité du valeureux orchestre symphonique du Cap ; de Sao Paulo à Kuala Lumpur, Bis joue, avec talent et conviction, la coupe du monde des orchestres.

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