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Hervé Niquet dirige Andromaque, tragédie lyrique de Grétry

Le concert de ce dimanche, consacré à Grétry, n'était nullement une initiative isolée. Il s'inscrivait dans le cadre des «Grandes Journées Grétry, Musicien de Marie-Antoinette».

Chaque année, le Centre de Musique Baroque de Versailles (CMBV) consacre ses «Grandes journées» à un compositeur clé de la musique française ancienne. Si le répertoire français oublié du XVIIIe siècle et du XIXe siècle sort de l'oubli, et y seront certes pour quelque chose. On leur doit, ainsi qu'à leurs différents partenaires, le plaisir de concerts pionniers dans l'exploration du patrimoine musical français.

Grétry est resté célèbre comme compositeur d'opéra-comique, mais sa tragédie lyrique Andromaque est assez méconnue. Nous étions heureux d'entendre ressusciter ces pages, soucieuses de grandeur héroïque, et déjà empruntes de sentiments romantiques. L'orchestre, bien plus développé que celui des opéras-comiques du compositeur, présente une palette de couleur travaillée et un raffinement psychologique indéniable. L'attente et la curiosité que pouvaient susciter un tel concert ont toutefois été déçues par l'interprétation, en dépit de quelques heureux solos des bois. Les meilleurs chefs ont des journées moins réussies que d'autres. L'orchestre n'était pas toujours ensemble, certains tempos semblaient inadéquats, et quelques moments d'émotion ont paru inaboutis. Ces imperfections ressortaient d'autant plus que l'œuvre était donnée en version de concert. Les chœurs, omniprésents, ont compensé ces défauts : ils ont su respecter les délicates articulations de la langue tout en faisant palpiter et ressortir les sentiments qu'elle exprime.

Les chanteurs n'étaient peut-être pas tout à fait assortis, dans des numéros inégaux en qualité. avait, paraît-il, remplacé au pied levé la chanteuse prévue pour le rôle. L'étude interprétative du rôle n'a en conséquence pas été tout à fait poussée, mais on a apprécié son timbre et son éloquence musicale. Son air principal du deuxième acte, accompagné par les flûtes, a été émouvant. Il était audible que la mezzo-soprano avait eu davantage de temps pour préparer son rôle : elle a rendu avec talent les accès de coquetterie ou de fureur de son personnage. Le ténor possède une puissance indéniable ; sa diction est très claire, mais au prix d'une voix un peu criée. On a apprécié son implication dans le rôle de Pyrrhus, mais regretté les quelques écarts de justesse dans les descentes. Le baryton grec , souvent couvert par l'orchestre, a fait preuve de charisme et d'accents émouvants. Il brilla notamment dans la scène finale qui couronne la fin de la tragédie lyrique. On est heureux d'avoir écouté ce bel ouvrage, même si on est un peu moins enchanté de l'orchestre et de la direction. Certaines pages ont cependant fait montre d'un grand raffinement, certains airs furent touchants, et, répétons-le, le chœur tout à fait remarquable.

Crédit photographique : © Vincent Jacques

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