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Louis Vierne à l’allemande

Depuis la reconstruction récente de la Frauenkirche de Dresde, détruite en février 1945 par les bombardements alliés, le nouvel orgue est largement enregistré par la firme Carus. Cet instrument remplace dans un buffet à l'identique le précédent avec un matériau sonore reprenant les trois plans manuels de l'orgue Gottfried Silbermann d'origine, augmentés d'un quatrième clavier, inspiré des grands récits symphoniques français « alla Cavaillé-Coll ». Daniel Kern fut choisi pour ce travail, à cause de sa grande connaissance de la facture des Silbermann d'Alsace, où il exerce habituellement. Du coup ici, cet orgue avec son noyau baroque s'ouvre, grâce à ce plan rajouté, à un plus vaste répertoire, dont la musique symphonique française jusqu'à nos jours.

Nous avons entendu dans cette église déjà un CD Carus (83. 405), consacré aux Symphonies n° 3 et 5 de . Les Pièces de fantaisie pour grand orgue, écrites alors que Vierne était organiste à Notre-Dame de Paris, s'inscrivent complètement dans cette optique. Même si la couleur générale diffère quelque peu des modèles parisiens, cet auteur est ici à l'aise, traitant cette musique avec toute la finesse de registration requise. Chaque pièce, d'une durée de moyenne de sept minutes, en général construite sur le modèle A-B-A, développe un climat particulier, permettant d'entendre tour à tour, divers mélanges et jeux de solo. Certains sont très beaux : les fonds de huit pieds dans le Lamento, les flûtes harmoniques dans Clair de lune, les anches du récit mêlées aux fonds du grand orgue dans Cathédrales, ou encore le tutti dans la Toccata.

L'acoustique très large restitue avantageusement l'ambiance des grandes cathédrales, où cette musique reste dans son élément moteur. Cela prouve que ce concept quelque peu hybride d'un orgue moderne alliant le baroque et le romantique peut convenir correctement, c'est ce qu'a dû tenter ici . L'expérience est concluante et fédère un grand nombre de spécialistes et de simples mélomanes amateurs d'orgue. Rappelons aux nostalgiques que l'instrument d'origine, bien que conçu au XVIII siècle avait déjà été largement transformé avant sa destruction, et permettait sans problème d'aborder des auteurs post-romantiques tel Max Reger. C'est donc un juste retour aux sources successives de cet instrument. Ce disque s'inscrit dans une vaste collection de CDs enregistrés en ce lieu, où l'on retrouvera musique symphonique, chorale, et organistique, de la renaissance à nos jours, de quoi satisfaire le plus grand nombre.

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