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Passe-moi le filtre sonore

Private domain Iko

L'album, sorti chez Naïve, avait obtenu un certain succès. Remixer du classique (dont, excusez du peu, la Passion selon Saint Jean, le Requiem K626, Les Indes galantes, La Traviata, le Lamento della Ninfa, …) est toujours très risqué, le piège du mauvais goût et de la soupe commerciale n'est jamais très loin. Serge Gainsbourg lui-même préférait ne prends que des thèmes pour en tirer les succès que l'on sait (Baby alone in Babylon, Initials BB, Lemon Incest, …).

Pour ce «remix», Iko (mais qui est-ce ?) s'est entourée d'artistes venus d'horizons variés, une ensemble instrumental (quatuor à cordes, contrebasse, guitare baroque / théorbe) et un ensemble vocal rompus au classique, la chanteuse , du groupe de country / folk / blues Moriarty, le duo de pop folk Paul et Louise, Marc Collin, du groupe punk / new wave Nouvelle Vague, et Para One, deux grands noms de la techno electronica (pour résumer : de la techno qui n'a pas pour vocation première de se faire trémousser à Ibiza) et Emilie Simon, qu'on ne présente plus. Bref des «artistes Naïve».

Le résultat est à la hauteur des moyens engagés. Le postulat de base d'Iko (mais bon sang, qui est cette Iko inconnue jusqu'alors ?) «marier la richesse fascinante de l'électronique au classique, c'est pour moi une manière d'alerter l'oreille des gens… » est réussi. Mozart, Purcell ou Bach ne voient pas leurs perruques dépoussiérées, ce ne sont pas des mélodies archi-connues revêtues de «boum-boum-tchak» pour faire branché et moderne. Ouf ! En véritables musiciens professionnels et artisans du son, Para One, , Paul et Louise, Marc Collin, Iko (quelqu'un a-t-il la réponse dans l'assistance ?) et Emilie Simon (malheureusement absente de la scène ce soir là) remodèlent ces classiques sans les pervertir, en respectant le propos initial du compositeur. Les variations de La Jeune fille et la Mort de Schubert se trouvent prolongées via les différents effets de filtre par l'électronique, Les Sauvages des Indes Galantes restent, malgré la transformation du texte (Forêts paisibles devenu Here in This Place) une danse, etc. Après, certaines libertés, comme rajouter un chœur chantant les paroles du Gesang der Geister über der Wassern de Gœthe (mis en musique par Schubert à la base) sur l'Allegretto de la Symphonie n°7 de Beethoven, peuvent surprendre (tiens, Iko connaît ses classiques du chant choral… un début de réponse). Mais qu'importe…

Saluons donc ce travail d'intelligence musicale, de musique «cross over» qui vise enfin autre chose que l'appauvrissement, dans la lignée de The Seduction of de Art of Noise. Quant à Iko, on t'a reconnu, Laurence !

Crédit photographique : © Fernando Corona

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