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Le très beau Chopin de Blechacz

Anniversaire oblige, l'actualité Chopin bât son plein. Et pourtant on ne peut pas dire qu'il ait à aucun moment sombré dans l'oubli ou l'indifférence. Bien au contraire, l'œuvre de attire et fascine les interprètes autant que les auditeurs de toutes les latitudes. Vainqueur remarqué du Concours Chopin, le jeune polonais Rafal Blechacz vient d'enregistrer les deux fameux concertos pour piano. L'Orchestre royal du Concertbebouw et le chef polonais se montrent très attentifs à créer un tissu sonore dense, ductile, voire sensuel, capable de dresser la toile de fond idéale sur laquelle va s'exprimer le pianiste.

Les uns et les autres n'oublient pas que ces opus 11 et 21 appartiennent aux compositions de jeunesse du maître, époque où il vivait en Pologne et se nourrissait avec gourmandise d'idées et d'atmosphères lyriques et sentimentales. Fougueux, un rien raide dans les tempos accélérés, Blechacz se révèle rêveusement contemplatif dès que le climat l'impose. Il est intéressant de noter que les protagonistes de cette belle gravure ne tentent aucune percée vers quelqu'expérimentation forcément hors de propos dans ce contexte historique et esthétique fort bien délimité. C'est dire si l'écoute nous ravit par son élégance, son classicisme, son soyeux et pourquoi ne pas l'avouer sans ambages par son romantisme naturel et intense à la fois. La langueur et le velouté côtoient les élans énergiques, peu nombreux il est vrai, mais du plus bel effet. Les émotions s'inscrivent sans excès dans un contexte où le beau piano et le beau son ne doivent jamais être rejetés.

A ce titre, et au sein d'une discographie pléthorique où l'on ne saurait oublier les prestations de Krystian Zimerman (Orchestre du Festival polonais, DG), de Boris Berezowsky (Ensemble orchestral de Paris, dir. John Nelson, Mirare), de Tamas Vásáry (Orchestre philharmonique de Berlin, dir. Jerzy Semkov et Janos Kulka, DG) et Bramka Muselin (Orchestre symphonique de Stuttgart, dir. Hans Muller-Kray, Musidisc), pour n'en citer subjectivement que très peu, la version de Rafal Blechacz figure en très bonne place et demeurera comme l'une des plus inoubliables par son charme intrinsèque et son respect inspiré de l'esprit autant que du texte chopiniens.

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