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Le retour de Matti Salminen à Cologne

Ce fut un moment attendu. , troupier à Cologne dans les années 1970, revint au bord du Rhin après 30 ans d'absence.

Pour lui, on avait repris la froide mise en scène de Don Carlos de 2002, signée Torsten Fischer, qui avait transposé cet opéra de façon plutôt maladroite dans l'Espagne franquiste. On parle d'épée, mais on brandit des pistolets, les députés flamands rappellent les Juifs et Philippe II tue personnellement son fils – avant que le spectre de Charles Quint ne puisse intervenir. Les décors, d'ailleurs, ne changent pas pendant quatre longs actes. Pas de monastère ni de jardin, mais toujours le même long couloir…

Mais à vrai dire, personne n'était venu pour la mise en scène. est au centre de cette soirée – et son roi Philippe, menaçant et vulnérable à la fois, mérite effectivement le détour. A plus de 40 ans de ses débuts professionnels dans ce même rôle, la voix n'accuse aucune usure. Imposante dans le forte, impressionnante dans les aigus, chaude dans les graves, c'est dans le piano qu'elle fascine le plus. Ainsi, lorsque Salminen attaque la reprise d'«Ella giammai m'amò» dans un triple piano, toute la salle retient le souffle… Pour l'occasion, Salminen est entouré d'une distribution de haut vol. A ses débuts en Rodrigue, fait entendre une belle voix de baryton lyrique, à la couleur étonnamment italienne et à l'aise sur toute la tessiture. Se montrant, de surcroît, capable d'un superbe légato et de magnifiques nuances, il réussit une scène de la mort particulièrement émouvante.

Excellente actrice, affrontant crânement les nombreuses difficultés de son rôle, campe une formidable Eboli. Intrigante comme il faut en première partie sans grand air arrache les larmes à plus d'un spectateur. A ses côtes, incarne une touchante Elisabeth. Sa voix richement timbrée se déploie avec facilité dans les grands élans dramatiques, mais manque un peu d'assise lorsqu'il faut chanter piano dans le registre aigu. Acteur intense, (débutant lui aussi) donne un Carlos constamment au bord de la crise des nerfs. Dommage que cela concerne également son chant trop avare de nuances et souvent poussif dans les aigus. Dommage également que Nicolaï Didenko soit tellement dépassé par les aigus du Grand Inquisiteur, plus criés que chantés. aurait mérité un adversaire plus digne dans la grande confrontation des deux basses…

Photos : (Eboli) et (Don Carlo) ; Matti Salminen (Filippo II) et Nicolaï Didenko (Il Grande Inquisitore) © Klaus Lefebvre

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