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Eugène Brancoveanu, un baryton qui tape dans l’œil

Dans une ville éminemment lyrique, les San Francisco Performances se devaient de conclure dans le même ton. C'est le jeune baryton qui a eu ce privilège. Accompagné par le très stylé , cet ancien Adler Fellow de l'Opéra de San Francisco a fait mouche.

Toutes les voix d'opéra, surtout aussi profondes, aussi généreuses que la sienne ne sont pas taillées pour les lieder et c'est en sculpteur patient et acharné de son instrument qu'il a conquis ce répertoire avec pour seul mot d'ordre : l'action.

Son timbre riche et ténébreux épouse le pathos du compositeur russe Sviridov et le baryton offre de poignantes interprétations de Simon, Peter… Where are you? ou encore It sounds, it sounds, the fateful trompet! porté par un pianiste en idéale osmose, calqué sur sa respiration. Frissonnant de désespoir ou fatigué d'espérer, toute la tragédie de la terre russe y passe.

Son talent de scène tient en haleine dans Ravel autant que dans Schubert ou son contemporain, Lœwe. Don Quichotte à Dulcinée manie divinement la douce dérision et La chanson à boire est à marquer d'une pierre blanche, tant par la fraîcheur de son français, que par l'aristocratie de son ébriété. Brancoveanu est également un interprète de goût dans Schubert et particulièrement dans l'Erlkönig où explosent sa gamme expressive et ses couleurs vocales pour laisser le public transi.

Son sens du drame et sa recherche de raffinement ne laissent pas Lœwe s'effacer devant son éminent contemporain avec son propre Erlkönig. Au contraire, avancer avec lui dans ces pages méconnues c'est pénétrer dans la caverne d'Ali Baba. Le soliste insuffle à ces lieder fantastiques, tragiques et pittoresques une vie trépidante et, comme dans le magnétique Tom der Rimer, en révèle toute la magie.

Crédit photographique : © Robert Bengtson

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