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Concert autour du bandonéon

Orchestre philharmonique de Liège

Dans le cadre de sa série de concerts dédiés à la musique du monde, l'Orchestre Philharmonique de Liège donnait carte blanche à Manu Comté pour emmener le public à la découverte du bandonéon, instrument emblématique du tango.

Moins connu que l'accordéon, cet instrument s'est imposé durant l'entre-deux guerres comme le symbole du tango en Argentine. Contrairement à l'accordéon, le bandonéon se joue assis, posé sur un genou, et il est impossible de se déplacer en jouant. Le bandonéon requiert également d'avantage d'effort physique car l'amplitude de l'ouverture du soufflet est plus importante que celle de l'accordéon. Au niveau musical, son timbre se montre plus acide que celui de son cousin. Sa mécanique offre également plus de liberté à l'instrumentiste que celle de l'accordéon. Pour ce dernier, la main droite occupe la partie mélodique et la main gauche le remplissage harmonique. Dans le cas du bandonéon, jouer une mélodie est possible aussi bien de la main gauche que de la main droite.

Pour illustrer toutes ces possibilités, Manu Comté ouvrait ce concert avec le concerto Aconcagua de l'incontournable Piazzolla. La pièce est composée pour orchestre à cordes et percussions. Le piano et la harpe enrichissent encore la palette sonore d'une œuvre qui au delà de sa partition soliste, offre également un agréable solo au violon dans le Moderato. La gestuelle franche et claire du jeune convaincs visiblement les musiciens qui restituent à la musique de Piazzolla toute sa subtilité et sa rythmique ludique. Manu Comté, lui, rayonne particulièrement dans le mouvement médian, par une musicalité toute en pudeur et incroyablement nuancée.

, guitariste virtuose ayant travaillé avec Piazzolla était l'invité de Manu Comté. Admirateur du travail de Gubitsch, Comté l'avait invité à composer une pièce mêlant guitare et bandonéon accompagnés d'effectifs orchestraux similaires à ceux de l'Aconcagua. Avant cette création, les deux musiciens ont interprété quelques duos de leurs compositions dont le frénétique et jubilatoire Moonmist écrit par Comté, où la vélocité des notes ne parvient jamais à prendre en défaut les deux virtuoses. Alléchés par ces duos, notre enthousiasme pour Ecos de la ciudad herida s'est malheureusement restreint au fur et à mesure de la création de la pièce. Le talent de compositeur de Gubitsch n'égalant hélas pas sa technique de guitariste. Les parties solistes sont peu captivantes, et l'orchestre n'a que peu de répondant à leur apporter, malgré les efforts de , pourtant habitué à se frotter au répertoire contemporain.

Après la pause, c'est le groupe Soledad qui s'est réunit autour de Manu Comté. Les artistes ont présenté leur nouvel album Soledad in Concert ( label Enja Records) qui rassemble autour de standards de Piazzolla et Gismonti des compositions originales des musiciens du groupe. Soledad est une formation haut de gamme. Ses membres ont développé chacun un parcours classique très pointu avant de se réunir au service de cette forme d'expression aussi rigoureuse que décomplexée qu'est le tango nuevo. Brillant et enivrant, leur travail a légitimement conquis le public liégeois qui a quitté la salle philharmonique du soleil plein la tête.

Crédit photographique : Manu Comté © Jan Scheffner

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