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Flûte et guitare autour du tango au Cabaret Contemporain

Le propose des concerts apéritifs comme il en manque tant aux Parisiens. En ces soirées automnales, c'est dans la pénombre du café artistique l'Abracadabar que l'on écoute du tango et des airs brésiliens, autour d'un verre. Quelques tables nous séparent des deux jeunes musiciennes, et , jouant en duo flûte-guitare, à la lumière des néons écarlates.

Toutes deux possèdent bien ce répertoire : , élève du Conservatoire Supérieur de Genève, a montré son goût et son talent dans le répertoire contemporain, depuis ses prestations remarquées au festival Aujourd'hui Musiques jusque dans son projet de réaliser un disque de récital contemporain pour flûte seule chez Triton. , actuellement professeur de guitare classique en conservatoire, s'est formée avec des guitaristes argentins prestigieux comme Roberto Aussel et Jorge Cardoso, ou encore avec la madrilène Margarita Escarpa.

Réentendre les pièces de l'Histoire du Tango d'Astor Piazzolla est toujours source d'appréhension… Sorti depuis longtemps de son berceau des quartiers populaires de Bueno Aires, le tango est tellement devenu un phénomène de mode que le surnombre d'interprétations a parfois entamé ou affadi la saveur de cette musique faite d'extrêmes passions et de sombres désespoirs. Pire encore, la beauté féline de la musique d'Astor Piazzola, a souvent été mise en cage dans des interprétations très cérébrales, l'enfermant dans un écrin de respect que l'on ne réserve qu'aux pièces de musée. Mais la prestation d' et d', dans l'atmosphère intimiste d'un bar de nuit tente de raviver les couleurs sonores, émotionnelles et charnelles de cette musique hors des temps et des modes.

Comme pour introduire ce tango, le programme s'ouvre sur la pièce de Jacques Ibert, dont les harmonies et le jeu de la guitare préfigurent déjà la musique hispanique. Cette scène d'exposition permet au duo de révéler toute leur virtuosité, ainsi que des intentions musicales franches, des couleurs contrastées. Puis jaillit la gaité du fameux «Bordel 1900», le dialogue entre les deux musiciennes est ample et équilibré, le discours musical dynamique et enlevé, contraste avec la morosité, la noirceur du «Café 1930». Ici la flûtiste prend le temps de délivrer des couleurs émotionnellement chargées, pour mieux décrire le profond désespoir, la sombre violence de cette musique. Le «Nightclub 1960» prolonge encore la magie de l'instant. Après un Irish Jigs très remarqué au traverso solo, le concert se fait brésilien. Les Bachianas Brasilieras n°5 de Villa Lobos et les Airs Brésiliens de Celso Machado sont un ravissement, et le duo, prenant plaisir à jouer ce répertoire nous délivre une musique aux thèmes insouciants et à l'ornementation ciselée.

Voilà donc une soirée des plus agréables, en compagnie d'un public jeune et réceptif. Pour le bis du concert, un couple se met à danser sur la piste à quelques mètres des musiciennes, témoignant au nom de tous les spectateurs de notre plus vive gratitude.

Crédit photographique : © Le

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