Dans un article à paraître nous soulignons combien le compositeur danois Carl Nielsen, vers la fin de sa carrière, avouait avoir connu un puissant bouleversement à la (re)découverte de la musique vocale du XVIe siècle et notamment au contact de la Missa Papae Marcelli de Giovanni Pierluigi da Palestrina.
On ne peut que le comprendre et acquiescer à l'écoute de cette œuvre immortelle dans l ‘enregistrement récent de l'ensemble Odhecaton riche de six contre-ténors, six ténors, deux barytons et cinq basses. Ces voix précieuses et magnifiques structurent un volume sonore dense, empli, opulent et généreux. Quel régal ! La formation dirigée par Paolo Da Col prend garde de rester à distance des effets romantiques, faussement mélodieux et émotionnels, anachroniques, tout comme d'une exécution froide, sèche académique, rigidement figée sur des notes sans vie. Toute complaisance suspecte se voit rejetée. Et le résultat s'impose de lui-même car nous voici en présence d'une interprétation fabuleuse, impressionnante, d'une profondeur susceptible de franchir les siècles sans se rider ni se galvauder.
La rigueur ne dissout pas le frisson, pas plus que l'authenticité ne nuit à la séduction de la voix de l'homme chantant justement et loyalement son dieu et sa propre destinée. La prise de son renforce un sentiment de communion (œcuménique ?) exemplaire. Le livret propose le texte latin chanté en traduction française et les notes de présentation complètent heureusement ce CD chaudement recommandé au service d'une œuvre immense, lumineuse, atemporelle. C'est «énorme» comme l'on dit maintenant !