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La flûte ailée de Pierrette de Fauconval

C'est sur le thème de l'envol, du dépassement de soi et de la transcendance que la flûtiste avait imaginé son parcours sonore en invitant sous la superbe voûte de la Maison Cadinot le vidéaste et plasticien Roger Bénévant ; ses « décors » projetés à même le mur entraient en résonance avec le son de la flûte, « pour que l'image devienne symbole » aurait dit dont les Incantations figuraient bien naturellement au programme. Magnifique interprète au son racé, avait à ses côtés la sculpture de bronze Ave Sol (Salut au Soleil) de Roger Bénévant, une silhouette « s'élançant et s'élevant à l'infini » dont elle faisait varier l'angle de vue au fil des œuvres interprétées.

Parmi les douze pièces d'un programme monté de manière fort astucieuse figuraient les compositions de chères à notre flûtiste qui en est la créatrice. Des Trois petites pièces pour des hymnes orphiques qui débutaient le concert aux Préludes suivis de Tribrachus qui le refermaient, la musique du compositeur et pianiste basque Sendrez – discret auditeur mêlé au public de la soirée – en appelle au rituel, cherchant à travers l'épure mélodique l'expression de forces originelles, ces « racines archaïques » qui relient chaque être à la communauté.

Dans une posture élégante autant qu'expressive, captait ensuite notre écoute avec Density 21, 5 d', une œuvre emblématique du répertoire du XXème siècle que Georges Barrère avait commandée au compositeur pour l'inauguration de sa flûte en platine. De Jolivet qui reçut l'enseignement de Varèse, succédaient alors trois des Six Incantations et la 5ème ascèse : des pièces pour flutes en do et en sol portées par la même énergie tensionnelle que l'interprète alternait avec divers chants d'oiseau, ceux de Stravinsky et de Mahler. Avec une précision d'attaque irréprochable et un son directionnel toujours habité, Pierrette de Fauconval passait avec le plus grand naturel du timbre suave et nourri d'un Jolivet aux sonorités lumineuses et incisives des oiseaux. La partie de piccolo du « Lever du jour » de Daphnis et Chloé de Ravel dont s'inspire dans son Prélude pour piccolo venait parfaire cette Fête de la Nature dans le contexte coloré et suggestif de la projection vidéo : un univers envoûtant et un parcours savamment rythmé « pour vivre le temps infini de l'imaginaire ».

Crédit photographique : Ave Sol © Roger Bénévant

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