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La caresse d’Anton Sorokow

Au Musikverein de Vienne, le violoniste autrichien (d'origine russe) a donné avec le pianiste l'impression d'un excellent duo, brillant particulièrement dans le répertoire post-romantique de Franck et Prokofiev.

La Sonate en sol majeur KV 301 de Mozart, sorte de bagatelle enfantine, installe déjà les protagonistes dans une merveilleuse complicité et démontre d'emblée leur grand talent à tous deux. Sorokow, surtout, éblouit par la pureté de son son : les attaques ne sont en rien altérées par le choc de l'archet, les notes tenues jamais troublées par son frottement. À ses côtés, Monti témoigne dans son jeu d'une élégance et d'un raffinement certains.

Trésor de la musique pour piano et violon, la Sonate en la majeur de Franck trouve ici des interprètes fidèles, qui font régner un climat d'intimité, parfois enfiévrée comme dans le deuxième mouvement (Allegro), mais aux accents toujours chaleureux. Sorokow caresse nos oreilles d'une plume, comme son violon de son archet. Il fait vibrer très fortement son instrument, un Guarneri de 1741, éprouvant la tension des cordes sans accuser le moindre tremblement. Au piano, Monti ne manque pas de finesse, mais parfois d'un peu de présence. On l'aurait aimé plus affirmé dans le Recitativo-Fantasia, même s'il est loin de perdre tout son répondant. La proximité de Sorokow doit être plutôt stimulante !

Dans la Sonate n°2 en ré majeur de Prokofiev, le violoniste se fait moins chatoyant, plus incisif et plus perçant, s'adaptant parfaitement au chant nerveux de la partition. Le thème du premier mouvement, qui revient en plusieurs occurrences, est sa seule source de détente. Quant à Monti, il se montre plus extraverti, laisse percer une pointe d'humour dans le Scherzo et ne se sent plus de joie dans le dernier mouvement, Allegro con brio. Dans l'ensemble, c'est une bonne version de cette œuvre exigeante, parfois ardue, au lyrisme subtil.

Les Quatres préludes op. 34 de Chostakovitch, arrangés par D. Tsiganov, sont d'une moindre portée dramatique et musicale, mais fournissent un bon divertissement. Ils sont exécutés avec un bonheur manifeste par les deux partenaires, qui font preuve de grâce et de fantaisie. Parfaitement compris par leur public, ils reviennent pour la Valse-Scherzo de Tchaïkovski, très spectaculaire ; puis, pour une Sicilienne de Marie-Thérèse von Paradis, jouée avec un calme presque indolent ; et enfin, pour la Valse de L'album pour enfants de Tchaïkovski, d'une innocence attendrissante, qui clôt délicieusement ce concert de haute tenue.

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