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François Dumont, du très grand pianiste

Abrégeons la litanie des récompenses concernant qui s'est perfectionné auprès de Murray Perahia, Leon Fleisher, Dimitri Baskirov,  Pierre-Laurent Aimard, notamment. Lauréat de divers concours prestigieux, remarqué au disque avec le Trio élégiaque dont il fait partie (Clef ResMusica en 2007 pour le CD Messiaen / Dusapin), remarqué aussi aux Victoires de la Musique classique, ce pianiste est à l'orée d'une grande carrière.

possède ce à quoi l'on reconnaît les très grands pianistes : une sonorité riche et lumineuse ; la sienne est des plus rares. Un clavier qui chante à toutes les notes. Le sens de l'espace sonore et un toucher différent pour chaque compositeur. Ajoutons un vaste répertoire

de Mozart à Pascal Dusapin, bien rodé, ce qui lui permet de donner jusqu'à trois concerts par semaine en parcourant l‘Europe, en visitant les autres continents tout en abordant de nouvelles oeuvres. Ferveur, concentration et sérénité sont associées à chaque prestation. Lors du concert de Bagatelle, le pianiste fit oublier le côté un peu vert d'un Steinway  beau mais récent.    Dans la sonate op.58 de Chopin, le pianiste organise les volumes sonores comme dans une pièce à trois voix : la partie intermédiaire joue le même rôle que les deux autres, elle chante, dotée du même rayonnement, elle double la mélodie sans  se contenter de l'accompagner. Dans Les années de pèlerinage , nous sommes conduits vers le rêve, le scintillement, les miroitements de l'eau, les frémissements des arbres, sans jamais que la virtuosité ne se remarque ;  le pianiste, comme toujours, se fait humble devant la partition, même les apothéoses appartiennent moins au pianisme qu'à la fidélité une  écriture éblouissante sans faire-valoir. Le  Clair de lune  de Debussy offert en bis, revêt une transparence ineffable, nimbée d'un  halo de tendresse que sait y mettre , en fait un moment unique, inoubliable triomphe assuré.

est lauréat du concours de Genève et Long –Thibaud à 20 ans, offrant de superbes moments, le concert n'en fut pas moins une épreuve pour les artistes : la belle salle de l'Hôtel de Soubise était transformée, pour une exposition, en bonbonnière, tapissée entièrement d'un feutre bleu doublé de coton ne laissant qu'une chance, fort réduite, au son ; un piano quelconque devait faire l'affaire et le violoniste était présent mais souffrant. Rompu à la musique de chambre, cependant, dès la deuxième pièce, sut donner le meilleur de lui-même avec la finesse mélodique qu'on lui connaît, après une sonate de Brahms ayant pâti des circonstances, le pianiste s'effaçant devant le violoniste affaibli pour ne pas le couvrir. En revanche, l'interprétation de l'œuvre de , intimiste et raffinée,surtout dans le beau mouvement lent, se chargea d'émotion, de gravité et de mystère. Quant à la splendide Fantaisie de Schubert, composée à partir d'un de ses plus beaux Lieder, Sei mir begrüsst, (Je te salue), elle convient merveilleusement au pianiste, à son aisance, sa sonorité idéale pour Schubert ; avec son style sans aspérités, ses clairs obscurs changeant, il nous entraîna avec son parftenaire, dans un monde autre, immatériel et familier. Le sens de la construction est là mais aussi la souplesse des rubatos, la précision et la justesse rythmique, essentielles chez Schubert et par-dessus tout, un lyrisme de tous les instants grâce aux  interprètes qui se répondent  avec un mélange de retenu et d'effusion provoquant des acclamations d'un public conquis et exprimant son enthousiasme, lui, sans modération.

Certes , il a vingt cinq ans ;merci néanmoins de ne plus parler, à propos de François Dumont, d'un jeune virtuose, d'un jeune talent, d'un jeune ceci et cela : il a changé de  catégorie, il s'agit  d'un grand pianiste, du  très grand François Dumont , tout simplement.   

 

Crédit photographique : François Dumont © Raf Thienpont

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