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Ambronay, la messe est dite

Couronné des feuilles d'or de ses marronniers, Ambronay a vu son 32ème Festival se clôturer dans une glorieuse lumière. Cette édition, dédiée à l'œuvre de Jean Sébastien Bach, en a extrait l'infinie richesse tout en la confrontant aux visions les plus contrastées. Du Magnificat dirigé par Václav Luks à la Messe en Si de , la programmation a remporté un succès sans précédents, renforçant de manière significative la fréquentation du Festival.

Avec ses deux dernières représentations, cette journée du Festival nous offre, pour la route, quelques pistes d'écoutes et de réflexions, comme pour laisser le public s'émerveiller encore devant l'œuvre insondable de Cantor de Leipzig.

Commençons par une réflexion en musique, tout d'abord, sur la symbolique des nombres dans l'œuvre de Bach, avec l'ensemble Les Nouveaux Caractères. La représentation Bach=14, concert/conférence à la fois savante, enjouée et accessible, a réussi le pari d'aborder un sujet ardu, et pourtant fondamental dans la compréhension de Bach. Illustrés par des mouvements des pièces marquantes du répertoire comme la Sonate en Sol mineur pour violon seul (BWV 1001), ou du plus fameux Prélude de Bach du Clavier bien tempéré, le rapport du 14 au 33, comprenez de Bach à Dieu, se dessine peu à peu et ne demande qu'à être approfondi.

Terminons sur une réflexion sur l'interprétation de la très attendue Messe en Si, dirigée par . Ce dernier concert est l'occasion de découvrir les jeunes talents de l'Académie baroque, personnalités musicales de demain, choristes et instrumentistes venus de toute l'Europe et formées par le maître.

La Messe en Si présentée ici suscitait l'intérêt à plus d'un titre : elle ne comportait qu'un seul choriste par pupitre pour les chœurs, et les choristes eux-mêmes ne chantaient qu'une partie de la Messe, présentant ainsi une expression du sacré gagnant en transparence, plus intériorisée, permettant aussi « d'incarner » chaque pupitre.

L'ouverture du Kyrie irradie sa ferveur, entre silences angoissés et longs accords plaintifs. L'orchestre est à la fois souple, précis et dynamique. Face à une telle pièce, poignante et profonde, et malgré un équilibre des voix du chœur un peu décevant au départ, de très beaux soli et duos –notamment le Domine Deus de Marie Jaermann et Safir Belhoul-. Le Gloria est marquant dans la mise en valeurs de ses contrastes, depuis l'introduction mordante – cuivres et bois magnifiques, aux sonorités douces et amples- jusqu'aux langueurs de l'Et in terra pax. A noter tout spécialement le solo de l'alto Maria-Chiara Gallo, d'une rare sincérité, se démarquant d'une approche distanciée par le voile de respect dont souffre trop souvent les pièces du répertoire sacré.

Le Credo voit venir un nouveau « quatuor », remarquable dans sa cohésion de voix et d'intention. Les entrées fuguées, les dissonances sont parfaites, si difficiles dans l'Et incarnatus est. Magnifique transition du Crucifixus au Et resurrexit, victorieux, communiquant l'enthousiasme jusqu'à la fin de la messe.

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