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A Modène, un Bal Masqué qui n’aurait pu être que routine

Dans le magnifique théâtre communal de Modène a été présentée la coproduction avec le théâtre de Parme d'un Bal Masqué qui démontre la vivacité du répertoire italien jusque dans le quotidien des citoyens transalpins.

En premier lieu, une mise en scène classique, sobre et sans fioritures qui n'éclaire pas forcément l'œuvre, mais ne la dessert aucunement, ce qui est une vertu suffisamment rare pour être signalée. Les changements longs des décors indiquent la lourdeur de ceux-ci, et l'ambiance de la caverne d'Ulrica ou du cimetière où se retrouvent Riccardo et Amelia est emprunte d'un mystère suscitant l'effroi et la crainte. Il y a même une sorte de direction d'acteurs qui, même en n'étant pas prodigieusement conçue, permet une grande liberté aux chanteurs et ne les contraint pas au statisme que l'on retrouve souvent quand aucune indication n'est donnée.

De cet opéra très équilibré dans le partage des rôles, la triomphatrice première de la soirée était , dans le rôle d'Oscar. Avec une voix pleine et riche dans les harmoniques, la chanteuse parvenait à intéresser dans un rôle d'appoint, avec certes deux airs principaux, mais elle intégrait ce rôle dans l'intensité dramatique. De même, Nicole Piccolomini, incarnant Azucena, avait une voix puissante dans les graves, dressant un tableau noir de la sorcière, même si cela se faisait parfois au détriment du haut médium.

Le couple principal se prêtait plus à la critique. , jouant Riccardo, possède une voix saine et juvénile. Mais le rôle est encore un peu trop lourd pour lui, et il manquait encore de certitude dans les aigus, qui étaient ainsi parfois un peu forcés. La plantureuse , au timbre opulent et généreux, conduisait mieux son rôle et l'angoisse de la pure Amelia était fort bien rendue. Toutefois, pour être tout à fait homogène sur les trois actes, la voix doit continuer à s'étoffer dans le médium. Enfin, Carlo Guelfi a l'âge (et la voix) du rôle ; sans être désagréable, la voix s'est considérablement élargie ces dernières années, ce qui n'est pas sans pâtir la ligne vocale générale.

Enfin, la direction efficace de fournissait un support attachant à la dramaturgie verdienne : sans cela, le spectacle n'aurait pas eu le même intérêt et n'aurait pu se révéler que routinier. On ne peut que saluer le métier du chef d'orchestre qui aura permis d'éviter l'ennui et aura éclairé un théâtre de province italienne de la tradition que l'Italie entretient avec le genre opératique, rappelant que Verdi était avant tout un homme de théâtre.

Crédit photographique : et © Rolando P. Guerzoni

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