Chris Cocchrane, le guitariste, Dennis Cooper, l'écrivain et Ishmael Houston-Jones, le chorégraphe, sont des survivants.
Des survivants des années Sida qui décimèrent la communauté homosexuelle aux Etats-Unis, puis dans le reste du monde, dans les années 80. Vingt-cinq ans après, ils remontent sur scène pour évoquer les rencontres fugaces des jeunes gay new-yorkais et la Grande Faucheuse qui brisa net ces vies à peine écloses.
Œuvre de témoignage créée en 1986, THEM mêle les textes de Dennis Cooper, la musique éruptive de Chris Cocchrane et les improvisations des danseurs orchestrées par Ishmael Houston-Jones. Sur le plateau, le contraste est émouvant entre ces trois hommes, qui portent dans leur corps vieillissants les stigmates du temps qui passe, et les silhouettes minces et toniques des jeunes danseurs qui participent au projet. Mais la structure chorégraphique proposée par Ishmael Houston-Jones n'est pas à la hauteur de l'enjeu émotionnel que le spectacle devrait produire.
A l'époque de sa création, la pièce suscitait la controverse, les lieux qui l'accueillaient risquant la fermeture. Il n'y a plus rien de subversif aujourd'hui dans ces corps à corps sensuels, ces brèves étreintes, ces ombres menaçantes. Lorsque Dennis Cooper dresse la liste de ses rencontres (ou de ses amants), on sourit à la tendresse du regard qu'il leur portent. Près de trois décennies après le début du plus grand fléau de la fin du XXème siècle, les ravages du Sida méritent peut-être aujourd'hui un projet artistique d'une toute autre portée.
Crédit photographique : © Ian Douglas