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Lukas Geniušas trop timide dans Chopin

Pari risqué, pour un jeune pianiste, que de s'attaquer au Concerto n°1 de Chopin, œuvre pour laquelle la concurrence discographique est des plus rudes (et s'il ne fallait en retenir qu'une version, ce serait pour nous celle de Zimerman/Kondrachine chez DGG). Le jeune , musicien russo-lithuanien né en 1990 et deuxième prix du Concours Chopin en 2010, tente le coup sans convaincre complètement.

Cette lecture se singularise par le fait que la partition orchestrale ait été réduite pour ensemble à cordes par le chef Wojciech Rajski, qui la dirige ici. Quelle idée incongrue que ce choix de diminuer encore la phalange chopinienne dont il est commun (et malheureusement assez juste) de dire qu'elle n'est utilisée que comme une « grosse guitare » ! On se souvient que Jean-Marc Luisada avait enregistré la pièce en formation chambriste avec le Quatuor Talich (RCA) non sans une certaine réussite, mais le présent arrangement n'est malheureusement pas du même tonneau. Privé des vents, l'orchestre manque d'autant de souffle que la direction de Rajski est sans intérêt et désespérément plate.

Dans ces conditions, Geniušas fait de son mieux pour attirer l'auditeur dans son univers poétique. Et justement, de poésie, il n'en manque pas. Proposant une lecture intime qui ne tombe jamais dans la sentimentalité impudique, force est toutefois de constater que si ses idées sont souvent bonnes, il ne les exploite pas forcément de manière optimale et ne va pas toujours au bout de ses intentions. Il semble ça et là un peu inhibé et manque d'un esprit conquérant qui le rend trop effacé par rapport à cette partition qui mérite un peu plus de panache (que Geniušas impose enfin dans le Finale, plutôt subtil). En somme, le jeune homme apparaît comme très prometteur mais encore un peu « vert » pour l'aventure.

En revanche, on lui trouve plus de qualités dans les pièces en solo qui complètent le programme. La délicatesse dont il fait preuve fonctionne mieux dans les Mazurkas op. 59 même si l'on regrette encore que la Polonaise offre trop de demi-teintes. Parti pris esthétique ou, là aussi, manque d'assurance ? Difficile à déterminer. Ses prochains enregistrements nous diront si Geniušas suit cette voie ou impose une véritable personnalité. A 22 ans, l'avenir est devant lui.

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