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Complaintes, élégies et chansons élisabéthaines

Le jubilé d'Élisabeth II aura donc été l'occasion de célébrer, indirectement, le règne d'Élisabeth I. C'est en effet autour des plus belles années de la période Tudor qu'est construit cet ambitieux programme, composé autant de pièces bien connues du public anglophile que de morceaux plus rares, dont certains rendent ouvertement hommage à la grande reine de l'âge d'or de l'histoire de l'Angleterre. Les amateurs de musique de la Renaissance anglaise pourront donc apprécier cet agréable CD, lequel permet de faire entendre les plus belles pages des grands compositeurs élisabéthains. Complaintes, élégies et chansons se succèdent généreusement, suscitant presque à l'écoute une certaine monotonie, certes davantage imputable aux défaillances toute relatives de l'interprétation qu'à l'inspiration musicale des morceaux en question, tous de la meilleure facture.

En effet, s'il est doté d'une voix chaude et ronde, qui a cependant tendance à s'aigrir très légèrement dès lors qu'il atteint le haut médium, ne parvient pas encore à varier suffisamment les couleurs de son instrument. Plutôt faible en dynamiques, alourdie par une prononciation souvent molle, pâteuse et laborieuse, la voix du jeune contreténor ne permet pas toujours de faire apprécier les multiples beautés poétiques des textes qu'il interprète. Que l'on écoute ce qu'en faisait Alfred Deller en fin de carrière, avec des moyens vocaux pourtant extrêmement diminués, et l'on verra les difficultés qu'a encore à faire vivre un texte dans une langue certes traditionnellement difficile à manier pour les chanteurs francophones. Sans doute le théâtre, ainsi que la langue italienne, conviennent-ils davantage, à ce stade de sa carrière, à ce jeune artiste de plus en plus demandé aujourd'hui par les scènes internationales.

Parmi les cinq musiciens de l'ensemble , aucun n'est déméritant. Mais si l'on apprécie à sa juste valeur le luth sobre et attentif de Thomas Dunford, on aurait peut-être souhaité davantage de variété dans l'accompagnement instrumental des quatre violes, les sonorités de ce quatuor devenant à la longue quelque peu pesantes et monocordes. Sans doute cela est-il davantage imputable au choix d'un programme qui privilégie excessivement l'expression de la tristesse et de la mélancolie, voire de la morosité. La musique élisabéthaine n'est pourtant pas dénuée de pièces alertes qui auraient permis d'introduire dans ce CD un soupçon de liesse, de gaité et de légèreté.

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