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Fantaisies animalières à l’Opéra de Lyon

Pour son dernier concert de l’année 2012, l’Orchestre de l’Opéra de Lyon a offert à son public une après-midi symphonique, dans une ambiance qui avait de quoi réjouir toutes les catégories d’âge. L’enthousiasme bon enfant des musiciens de l’orchestre, emmenés par un Kazushi Ono délicieux d’humour et de jovialité, a trouvé sans peine à s’exprimer dans les trois « Fantaisies animalières » (pour reprendre le titre du concert) ; ces airs, pourtant sus de tous, ont conquis une nouvelle fraîcheur, qui a certainement convaincu les spectateurs que la musique la plus réussie n’est pas toujours la plus sérieuse.

Le Carnaval des Animaux, ouvrant les festivités, a immédiatement donné le ton. Introduites par le récitant Jean-Philippe Amy, dont la voix pince-sans-rire (quoiqu’un peu immuable) n’était pas sans effet dans le texte de Francis Blanche, les courtes scènes s’enchaînent avec brio. On retient particulièrement la performance des deux pianistes, tous deux étudiants du CNSM de Lyon, dont la fougue radieuse rend plus séduisants encore ces numéros. Les facéties musicales qui émaillent la partition font rire aux éclats, surtout quand Kazushi Ono lui-même, se retournant vers la salle, feint dans Pianistes d’être agacé par le jeu exagérément balourd de ceux-ci (qui se conforment en cela à l’indication de Saint-Saëns sur la partition), ou dans L’Éléphant, de se faire surprendre par le solo de contrebasse, merveilleusement exécuté au demeurant.

La musique du ballet Ma Mère l’Oye de Ravel était sans doute une partie plus faible du concert. Il faut dire que la direction d’Ono, insurpassable quant à la vivacité ou à l’élégance, manque quelquefois de précision ; les timbres de l’orchestre s’accordent un peu moins bien, et malgré les remarquables soli du premier violon, des déphasages se font entendre entre les percussions et les vents, et l’on s’ennuie un rien.

Mais enfin, dans le conte Pierre et le Loup, les puristes, qu’agacent les quelques facilités du Carnaval des animaux, et les enfants, que la douce mélancolie ravélienne laisse froids, se trouvent réconciliés. Les mélodies de Prokofiev jaillissent avec une simplicité désarmante. La clarinette du Chat est époustouflante, la flûte de l’Oiseau virtuose à souhait, et le basson du Grand-Père s’est affublé d’une barbe postiche ; tout ce monde adopte très naturellement un tempo allant qui sied à la partition, et retient l’attention des petits et des grands jusqu’à la dernière note.

On le sait, dans certains concerts « intergénérationnels », on mise sur l’indulgence ou l’inexpérience du public, et les exigences musicales sont revues à la baisse. C’est exactement l’inverse qui se produit à l’Opéra de Lyon : l’orchestre, sans rien céder de son professionnalisme, se prend entièrement au jeu, et pour le bonheur de tous, réussit sa cure de jouvence.

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