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Le Lac anti-glamour d’AragoRn Boulanger

Après Le Lac version cygnes de Luc Petton, ou les versions décapantes signées Andy De Groat, Matthew Bourne ou Jan Fabre, voici Le Lac version pénitencier.

En survêtement informe couleur passe-muraille, huit cygnes (garçons et filles) donnent du « Lac des Cygnes », le plus célèbre ballet de Tchaïkovski et Petipa, une version anti-glamour, totalement dépersonnalisée. Pas de tutus blancs, ni de points et d'encore moins de plumes pour ces cygnes uniformément gris, tristes et austères.

Le parti-pris austère du chorégraphe pour son travail avec les amateurs de l'atelier de pratiques artistiques de la MAAP, ne retient de l'histoire d'Odette/Odile qu'un discours sur l'aliénation. Camp de redressement pour adolescents ou hôpital psychiatrique, on hésite, à voir les mines chiffonnées de jeunes qui semblent tout droit sortis de « Vol au dessus d'un nid de coucous ».

Le chorégraphe refuse toute dramaturgie et ne tient aucunement compte du découpage du ballet, dont il utilise les extraits musicaux de manière juxtaposée. On est frappé par le manque d'aspérité du spectacle, mais aussi par son absence totale et revendiquée de séduction. L'effet très mat et austère de ce spectacle est renforcé par les coiffures sans apprêt, le fond de scène et le tapis de danse noirs ou les néons blancs utilisés en guise de lumière.

Conceptuellement, cette mise en scène radicale est intéressante. Cependant, pour marquer d'une pierre blanche l'histoire mouvementée des relectures du « Lac des Cygnes », elle aurait mérité d'être confiée à des interprètes plus aguerris. En effet, les propositions techniques restent assez pauvres, le chorégraphe faisant plus confiance à l'effet de masse des danseurs qu'aux individualités susceptibles de se détacher du groupe. Une prochaine fois, peut-être ?

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