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Laura Ruiz Ferreres, clarinettiste d’avenir

, jeune clarinettiste espagnole installée en Allemagne et plusieurs fois récompensée dans les concours internationaux, s'attaque pour son premier enregistrement à un répertoire bien connu des mélomanes et d'une grande difficulté : la musique de chambre avec clarinette de Brahms.

Rappelons que ces quatre oeuvres, composées quasiment l'une à la suite de l'autre par un Brahms au soir de sa vie, sont nées de la rencontre du compositeur avec le clarinettiste Mühlfeld et représentent le sommet de sa création – hantée semble-t-il par le spectre de la mort. Il est vrai que le timbre de cet instrument invite à la confession intime : brillant dans l'aigu, sombre dans le grave, il peut être sensuel ou plus intérieur, et épouser en somme tout le panel des émotions. Comme de juste, la musique de Brahms est tour à tour angoissée, mélancolique ou apaisée, mais toujours indéniablement maîtrisée sur le plan de la composition, et elle présente en outre une double gageure pour les interprètes, par la concentration de l'expression autant que la virtuosité requises.

De ce point de vue, le jeu de nous séduit d'emblée : les traits fusent sans difficulté audible, la gestion des nuances est impeccable, la respiration discrète et efficace ; la clarinettiste semble pouvoir jouer sans respirer, ce qui n'est pas une qualité moindre dans le répertoire auquel elle s'attèle.

Le point fort de l'enregistrement est à notre sens le célébrissime Quintette, sorte de concerto déguisé, où les interprètes font merveille : le quatuor est d'une grande cohésion, et la clarinette joue de manière fort ludique à cache-cache avec le premier violon, se fondant parfois dans la masse des cordes pour l'enrichir de la chaleur de son timbre, émergeant au contraire à d'autres moments dans l'aigu pour chanter ses phrases. Tout y est précis et musical, comme l'Adagio, d'une rare concentration – et tellement exigeant !

Les mouvements lents sont d'ailleurs particulièrement réussis, que ce soit dans le Quintette, le Trio ou les deux sonates, et ce n'est pas peu de chose.

On remarquera cependant que l'accompagnement de est quelquefois un peu nerveux et sec, notamment dans l'Allegro appassionato de la Sonate en mi bémol, qui aurait mérité un peu plus de phrasé à notre sens, dans une partie déjà passablement chargée. Reconnaissons toutefois que notre plaisir n'est en rien gâché, tant l'interprétation est d'une grande qualité générale, ce qui donne à cet enregistrement tout son à-propos dans la discographie et augure d'une belle carrière au disque pour cette jeune interprète.

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