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Concours Luc Ferrari à La Muse en Circuit

Le Concours d'Art radiophonique organisé par (Centre national de création musicale) et la Sacem a lieu tous les deux ans et offre aux lauréats la possibilité d'être joué en public, notamment dans le cadre du Festival Extension de (du 2 au 29 mai 2013) ou du Festival Archipel à Genève.

Rappelons que l'Art radiophonique tel que le définit Pierre Schaeffer, pionnier en la matière dès 1943, prône une écoute « sensible » réactive aux suggestions sonores face à une écoute « logique » aux prises avec la syntaxe des mots. « Si l'on peut réussir à transmettre, via les ondes radiophoniques, une vision de la réalité à travers le sonore, nous disait Pierre Schaeffer, on peut toucher une émotion d'ordre poétique ». L'Art radiophonique qui fait entendre « des voix sans visage, des musiques sans orchestre, des pas sans corps, des grondements sans foule » deviendra le médium privilégié de qui le pratiquera en parallèle avec l'art acousmatique et l'écriture instrumentale.

Le présent enregistrement produit par réunit les oeuvres des trois lauréats 2013, sollicitant chacune à leur manière notre écoute « sensible » immergée dans un flux émotionnel singulier.

aime capter les sons des environnements urbains, la rumeur spécifique de chacun des lieux qu'il pénètre. Dérive est le fruit de ses promenades dans Paris, débutées sur le parvis de Notre-Dame et poursuivies sur les rives de la Seine et dans certains lieux stratégiques (Le Sacré Coeur, La Tour Eiffel…): « j'ai pu marcher plus de 100 kilomètres suivant le flux et les rythmes changeants de la ville, dans une rêverie silencieuse» nous précise-t-il. Sons « naturels » et sons de synthèse se combinent ici en une trame virtuose, sans cesse modifiée dans son espace, sa profondeur et ses couleurs: surimpression, intensification, accélération ou ruptures nettes maintiennent la tension de l'écoute dans un univers où les frontières entre l'anecdotique et l'onirisme s'effacent à mesure.

« Bilad El Cham est un documentaire sensiblement engagé avec l'intention d'être au plus proche de ce que je sais de la Syrie », écrit dans sa note de programme. L'oeuvre est conçue comme une sorte d'audio reportage ponctué par les commentaires de la compositrice qui place ses micros au coeur de la population syrienne, privilégiant les scènes intimistes où les voix, les rires d'enfants, la langue du pays s'inscrivent dans le flux émotionnel. Peu de sons artificiels sinon pour lier une séquence à une autre. Entendue comme un écho lointain et inquiétant dès le début, la rumeur des combats occupe tout le champ sonore à la fin de la pièce dans un effet de dramatisation saisissant.

La troisième pièce est plus conceptuelle et retient toute notre attention. Correspon-Trans du compositeur mexicain est une pièce radiophonique sur les correspondances amoureuses: des lettres écrites à différentes époques, dans toutes les langues et la diversité des formules, sont lues par l'homme ou la femme selon son propre ressenti. Trois histoires d'amour fondent le scénario de ce « sonodrame multi-narratif ». Si la traduction nous échappe souvent – celle du japonais en l'occurrence -, la sensualité des voix à fleur de lèvres et la sonorité des langues captivent l'écoute. « traite » les voix (delay, réverbération, écho…), les inscrit dans un décor de nature ou les accompagne de sons de synthèse dans un contexte polyphonique parfois foisonnant et un espace-temps toujours intimiste et très émotionnel.

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