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Magnus Lindberg : un moderniste qui se souvient du passé

Le Concerto pour violon de date de 2006. Il nous semble assez exactement représentatif de la démarche créatrice de plusieurs compositeurs contemporains. Ce Concerto en trois parties, un chef-d'œuvre assurément, repose principalement sur l'esthétique provenant d'Alban Berg et plus précisément de son fameux et inspirant Concerto « à la mémoire d'un ange » élaboré en 1935 et inspiré par la mort prématurée de Manon, fille de l'architecte Gropius et d'Alma Mahler. Mais Lindberg n'en reste plus là ! Sans doute soucieux de proposer des paramètres susceptibles d'attirer davantage les suffrages d'un plus grand nombre d'auditeurs, il opte, sans sacrifier à l'essentiel, pour davantage de consonance, de pages lyriques, de sections acceptant des thèmes mélodiques sans renoncer le moins du monde à ce qui caractérise une écriture en adéquation avec  son temps sans rejeter de principe celle d'un  passé tonal très souvent contesté. Cette progression nous semble analogue au magnifique chemin emprunté depuis plusieurs années par son compatriote, l'ancien moderniste protéiforme Einojuhani Rautavaara.

Le Concerto pour violon fut présenté au public lors du Mostly Mozart Festival de New York en août 2006 suite à une commande en lien avec les célébrations du 250e anniversaire de la naissance du maître autrichien. La taille de l'orchestre de Lindberg est similaire à celui du début du 19e siècle et l'on peut supposer que l'environnement cité ait quelque peu influencé la démarche  créatrice du Finlandais avec ses motifs récurrents, son discours mélodique, sa relative douceur par intervalles.  Force est de constater que cette tendance intéresse également certaines créations, pas toutes, de Kaja Saariaho et Aulis Sallinen, qui retrouvent une charge émotionnelle trop longtemps dissoute ou révoquée sans se complaire pour autant  dans un passéisme inadapté au temps présent. aux commandes d'un incandescent, concis et minutieux offre à la partie soliste une parure déterminée et sincère et à l'ensemble une interprétation vraiment imposante. lui-même prend la direction de la même phalange pour défendre deux musiques répondant partiellement aux critères exposés plus haut, à savoir Jubilees et Souvenir (2010) de très belle facture.

L'origine de Jubilees se trouve dans une pièce pour piano écrite pour le 75e anniversaire de Pierre Boulez en 2000, retravaillée et augmentée pour grand orchestre en 2002 suite à une commande de l'Ensemble Intercontemporain. C'est l'excellent Alan Gilbert qui créa en novembre 2010, Souvenir, en hommage au compositeur Gérard Grisey décédé en 1998 et jadis maître de Lindberg, ainsi qu'à Franco Donatoni, un autre de ses professeurs,  qui écrivit en 1967 une œuvre pour grand orchestre également baptisée Souvenir. Ces œuvres orchestrales de la maturité nous rendent très attachant ce compositeur imposant, original et captivant.

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