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White Nights II avec Tatiana Masurenko

Deux ans après le premier volume, l'altiste nous revient avec ses White Nights volume deux, toujours consacrées au répertoire russe pour alto, et toujours en compagnie de au piano. Quant au programme, il alterne toujours entre transcriptions et oeuvres originales. Rien de nouveau, donc ? Si, une découverte, la Sonate de Banshikov. Mais chaque chose en son temps.

ouvre l'enregistrement avec des transcriptions de pièces tirées du splendide ballet de Prokofiev, Roméo et Juliette. Une première constatation s'impose : l'écriture souvent très dense du compositeur passe mieux à l'orchestre. Malgré les efforts audibles de , certains passages deviennent ici véritablement étouffe-chrétien, notamment dans la « Scène du balcon », notre petite déception parmi ces pièces. Si l'intention y est, le rendu de cette page manque en effet cruellement de légèreté, sans doute aussi parce que toutes les lignes mélodiques ont été sans discernement confiées à l'alto, ce qui ne permet bien évidemment pas les envolées dans l'aigu à la fin de la scène. Dans ces conditions, les interprètes font ce qu'ils peuvent, et si l'on ne peut que louer par ailleurs leur écoute réciproque, leurs qualités, on sort quelque peu frustré de l'audition de cette pièce.

Heureusement, ce n'est pas le cas de l'ensemble de ces transcriptions. « L'Introduction » est très réussie, pleine d'un lyrisme chaleureux, « La rue s'éveille » est piquante à souhait, cependant qu'un véritable équilibre entre alto et piano est trouvé dans la « Danse des chevaliers ». Ouf.

La Sonate de Banshikov ensuite crée un contraste des plus saisissants : dissonante, fragmentée à l'extrême en même temps que rendue unitaire par des rappels motiviques (fort ténus il est vrai), l'oeuvre est déconcertante de prime abord. Plusieurs écoutes attentives en révèlent néanmoins les qualités poétiques, bien servies par les interprètes. L'oeuvre peine cependant à soutenir la comparaison avec l'autre sonate au programme.

Car la pièce de résistance de cet enregistrement, c'est incontestablement la Sonate de Chostakovitch, que nous attendions d'ailleurs dès le premier volume de ces White Nights – tout arrive. C'est une de ces oeuvres austères, âpres, dépouillées et pourtant étonnement profondes. Le temps semble s'y abolir dans les mouvements extrêmes, élégiaques, qui encadrent un scherzo ironique dont le compositeur a le secret, très exigeant pour les interprètes.

Pour en rendre toutes les nuances, déploie une palette de sonorités très larges, du sombre murmure au cri déchirant, attentivement soutenue par . Notre coup de coeur ira tout particulièrement à l'adagio final, qui met à plusieurs reprise l'alto à nu ; sur la corde raide, égrenant quelques chapelets de notes, Masurenko parvient à y sonder les abîmes de la mélancolie. C'est beau, c'est triste, et l'on ne peut que retenir son souffle. Un monument s'érige.

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