- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Brahms en intégrale avec Chailly

En parallèle de ses tournées de concerts Brahms avec son Gewandhaus de Leipzig, le chef d'orchestre italien Riccardo Chailly publie l'intégrale des symphonies et des œuvres orchestrales chez Decca. En effet, le corpus intangible des symphonies est complété par les classiques orchestraux : Variations sur un thème de Haydn, Ouverture Tragique et Ouverture pour une fête académique. Mais on trouvera également quelques orchestrations de la main de Brahms : 9 des Liebeslieder-Walzer et 3 Danses hongroises sans oublier 2 des Intermezzos et 2 esquisses des Symphonies n°1 et n°2. Sur ce concept même, ce coffret n'a pas de concurrence.

L'idée de Chailly est de revenir à l'essence originelle de Brahms et de tourner le dos à une certaine tradition, plutôt germanique, qui transforme cette musique en épopée orchestrale mythologique presque néo-bruckérienne par sa puissance froide et intimidante. Le chef italien n'est pas le premier à tenter d'alléger les structures et à replacer Brahms dans sa filiation beethovénienne : Mackerras-Telarc, Berlglund-Teldec ou Noseda-Trito ont poursuivi, depuis les années 1990, cette veine artistique. Cependant toute ces expériences étaient menées par des orchestres de chambre sans passif brahmsien, alors que Chailly poursuit l'aventure avec un orchestre de tradition, et pas n'importe lequel : le Gewandhaus de Leipzig.

Le Brahms de Chailly, rapide mais jamais précipité comme un enragé, devient un modèle du genre : les structures sont allégées et les pupitres sont aérés. La fluidité mélodique s'impose avec une confondante évidence, en particulier dans les Symphonies n°1 et n°3 à la fois altières et d'une évidente limpidité.  Le maestro gère parfaitement les transitions thématiques qui s'imbriquent parfaitement construisant une interprétation au souffle épique. L'orchestre allemand lui répond avec une sollicitude et une adaptabilité des plus parfaites : Chailly réussit à faire maigrir la pâte orchestrale sans jamais faire perde la beauté sonore des pupitres de sa phalange, en particulier ceux des bois magnifiquement poètes.  Dans l'absolu, les fans de direction d'orchestre pure regretteront une carence d'imprimatur de chef et trouveront Chailly trop obnubilé par le sens des détails et des dosages.

Edité avec soin et porté par une belle prise de son, ce coffret est une référence moderne pour qui recherche un Brahms des années 2010 : à faibles calories et sans matière  grasse.

(Visited 918 times, 1 visits today)