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Porgy and Bess, du Cap à Bordeaux

L'opéra du Cap (Afrique du Sud) fait tourner cette production de Porgy and Bess dans le monde entier depuis 2012.

La partition n'est pas intégrale, quelques songs sont supprimés, l'ouverture se réduit à une très brève introduction, il manque environ 45 minutes de musique par rapport à la partition intégrale. Si musicalement le procédé est contestable (il n'y a pas vraiment de longueurs ou de moments de remplissage dans cette oeuvre géniale) elle a l'avantage de resserrer l'action en supprimant une bonne part des scènes de genre et tableaux descriptifs.

La mise en scène de est très traditionnelle. Forcément on passe de du bidonville de Katfish Row du XIXe à un township sud-africain du XXe siècle. L'arrogance des officiers – forcément blancs, rôles uniquement parlés – acquiert ainsi une résonance toute particulière. L'ensemble, par ses mouvements chorégraphiques et la multiplicité des groupes sur scène rappelle plus la comédie musicale que le grand opéra. Nous sommes en face d'une grosse production de Broadway, mélange entre la version épurée de Robyn Orlin et la lecture historique du Grand Opera de Houston. Le tout est très « premier degré » : Bess commence sa première scène habillée en pute pour finir avec son tablier de ménagère docile une fois établie avec Porgy, chaque rythme se double d'un pas de danse imposé, mais tout cela fonctionne redoutablement bien et finit par emporter l'adhésion.

La distribution, exclusivement des chanteurs sud-africains membres du Cape Town Opera, ne démérite pas, malgré quelques petits soucis vocaux décelés ça et là. De toute évidence nombre d'entre eux n'ont pas l'habitude des rôles de premiers plans. Le Porgy de , très bon acteur, possède une voix un peu fruste, « brut de décoffrage », qui colle bien au personnage. (Bess) est de toute évidence une mezzo-soprano, les aigus sont tendus – particulièrement criant dans la reprise de Summertime dans le dernier acte – mais le médium-grave compense largement, donnant ainsi une relief particulier au faux gospel Leavin' from the Promise Land. Mandisinde Mbuyazwa (Crown) et Siphamanda Yakupla (Clara) sont de toute évidence dépassés par leurs rôles, le premier donnant des signes de fatigue vocale au dernier acte, la seconde n'étant pas capable d'émettre les sons filés exigés dans l'air culte Summertime. L'ensemble des autres rôles est en revanche très bien tenu, avec une mention particulière pour (Sportin'Life),  (Jake) et (Maria) et un choeur du Cape Town Opera en grande forme.

A l'orchestre c'est la fête. Sous la direction d', jeune chef d'orchestre anglais membre du Cape Town Opera, l'ONBA swingue comme jamais et sait trouver la souplesse nécessaire pour défendre la musique de Gershwin. Cette production de Porgy and Bess n'était pas encore passée en France : il était temps.

Crédit photographique : © Cape Town Opera

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