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Schumann en édition de luxe par Rattle et Berlin

Le non renouvellement du contrat d'enregistrement entre l', son chef et la maison de disque Warner (ex-EMI), n'a pas démoralisé les musiciens berlinois et  : ils se lancent dans l'aventure d'un label autoproduit.  L'orchestre  n'est pas un profane  en la matière car il a déjà publié quelques DVD de concerts et d'opéras issus de leur Digital Concert Hall, salle de concert numérique unique au monde. Dans l'absolu, c'est tout de même un sacré symbole que l'orchestre le plus illustre du monde, l'un des plus actifs dans l'Histoire du disque depuis son enregistrement de la Symphonie n°5 de Beethoven sous la direction d'Arthur Nikisch, en  1913,  se lance dans un label. Les Berlinois rejoignent déjà un peloton assez-fourni avec des phalanges aussi prestigieuses que le London Symphony Orchestra, le Mariinski de Saint-Pétersbourg ou encore le Concertgebouw d'Amsterdam.

Mais à Berlin, on tient à se différencier et le mélomane peut faire ses adieux aux simples disques rangés de vilains boitiers en plastique pour découvrir un coffret livresque des  plus soignés : deux disques compacts et deux Blu-ray tirés des captations de concerts qui comportent l'audio et la vidéo. L'acheteur se verra même offrir en bonus un ticket découverte au Digital Concert Hall. Les ultra-collectionneurs pourront quant-à-eux acquérir une édition vinyl de grand prestige (pour un prix même pas scandaleux).

Pour ce premier titre, propose une intégrale des Symphonies de Schumann, partitions qu'il fréquente assidument au concert avec des orchestres modernes ou avec son cher Orchestra of the Age of Enlightenment sur instruments d'époque. De son côté l'orchestre connait son Schumann pour pratiquer cette musique depuis la fin de XIXe siècle et pour avoir enregistré par moins de 3 intégrales, toutes publiées chez DGG, avec les baguettes de : Herbert von Karajan,  Rafael Kubelik et James Levine.

Pourtant à l'écoute de ce coffret, on peine à considérer le chef anglais comme un brillant schumanien. On sent le chef soucieux d'énergie romantique et d'agogique  scrupuleuse, mais Rattle fait, comme souvent, du Rattle avec une mise en avant des moindres détails et des transitions au détriment de la vision d'ensemble. Les contrastes de tempos, sans concessions, apparaissent curieux et plombent les mouvements lents de la Symphonie n°2 et de la Symphonie n°4 (jouée dans son édition de 1841). Dans l'ensemble, à l'exception de la Symphonie n°1, homogène et dynamique, on peine à adhérer à cette vision trop intellectuelle et aussi à la sonorité volontairement mate de l'orchestre burinée par le chef anglais, qui souhaite faire sonner ses musiciens comme un orchestre  « authentique ».

Ce beau coffret est un superbe objet qui fera plaisir à tous les mélomanes, mais musicalement, Simon Rattle signe des interprétations qui risquent de se perdre dans une discographie bien fournie. Dans l'optique d'une tradition revisitée avec un orchestre moderne, David Zinman (Arte Nova) et Paavo Järvi (RCA)  restent les références contemporaines pour se limiter à des gravures des années 2000 ou 2010.  Si l'on cherche une intégrale Schumann par les Berlinois, James Levine  reste le meilleur choix, dans une optique certes très traditionnelle.

  

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