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Renouveau du Festival de Saint-Riquier

Le dimanche 13 juillet il y a une exception. Le concert du jazz à 18 heures 30 est remplacé par le concert classique du soir à l'abbatiale : la Messe à 40 voix d', complétée du Magnificat pour 2 chœurs d' et du Memento à 8 voix de , exécutés par sous la direction de . Le chef a mûrement réfléchi à la disposition des musiciens par rapport à la configuration de l'édifice, afin d'obtenir la meilleure acoustique possible. Ainsi, l'orchestre et les chanteurs sont installés au milieu de la nef. Effectivement, cela permet aux instruments et aux voix de fusionner et de résonner de manière compacte, sans dispersion inutile du son, donnant la clarté à l'écriture (le public peut distinguer nettement les différentes parties instrumentales et vocales), due, à l'évidence, à la performance remarquable des musiciens. Chacune des trois œuvres est précédée d'un introït (ou antienne), ce qui met en valeur la polyphonie complexe qui suit, dans une atmosphère sonore procurant un bien-être, corps et âme.

Le dernier jours du Festival, lundi 14 juillet, reprise à la normale : le concert de clôture à 21 heures, sous le thème des « Grandes eaux musicales de Londres à Versailles », avec les œuvres de Francœur, Rebel et Rameau composant une « Suite de Symphonies », et de Haendel (Water music) ; l' et son chef , changent la disposition de l'orchestre pour la seconde partie. Dans un premier temps, les musiciens sont installés en direction du chœur, tandis que pour la seconde moitié du concert, il est disposé vers la porte ouest. Il fait ainsi bénéficier plus équitablement aux auditeurs qui entourent l'orchestre, de l'excellente interprétation, très équilibrée entre les cordes et les harmonies. L'élégance et la certaine légèreté dans la Suite à la française cèdent naturellement la place à la musique majestueuse et cérémoniale de Haendel, grâce à la basse continue merveilleusement jouée et aux parties solistes qui se détachent de l'ensemble tout en restant intégrées dans celui-ci. Quand, à la fin, les quatre danseurs des deux compagnies, Beaux-Champs et Les Jardins chorégraphiques, en magnifiques costumes, rejoignent les musiciens, l'émerveillement des mélomanes est à son comble : un beau bouquet final, en effet !

Ces mêmes compagnies de danse baroque sont donc présentes tout au long du Festival pour un spectacle de leur création, « Les Indes Galantes ou les Automates de Topkapi ». La fille du grand Turc découvre les cadeaux de la France dans le palais de Topkapi : cinq automates – deux clavecinistes et trois danseurs – qui s'animent pour une version mécanique des Indes Galantes de Rameau. Progressivement les automates s'humanisent et la fille du Grand Turc tombe amoureuse de l'Inca, suscitant quelques rivalités entre les poupées. Dès qu'on met les pieds dans la salle, le petit « chauffeur de la salle » distribue gracieusement aux spectateurs le programme, imitation de la frontispice de la partition ancienne, avec les mentions réinventées : « Dansé du Neuvième au Quatorzième jour de Juillet de l'An 2014 à l'Abbaye Royale de Saint-Riquier » et « M. M. XIV. Cum privilegio H. Niquetis ». Ce petit bout de papier, sur lequel l'argument et les noms de musiciens et danseurs sont écrits suivant l'orthographe et la typographie de l'époque, nous met déjà dans l'ambiance. Des mouvements de mécaniques aux prouesses chorégraphiques parfois drôles (coups de poings entre l'Inca et le Persan), les danseurs et les clavecinistes assument parfaitement leur rôle, sans jamais laisser aux spectateurs un temps mort. Nous espérons toutefois le même niveau de performance vocale que l'idée et la danse, pour que le spectacle atteigne sa plus haute qualité.

Pour le jazz, le pianiste qui joue en solo à 16 heures et en trio à 18 heure 30 le dimanche 14, fait preuve d'une grande inventivité en assimilant des standards dans son propre langage musical, avec beaucoup de liberté tout en respectant le classicisme traditionnel.

Le Festival se clôt par un spectacle de son et lumière sur la façade de l'église abbatiale. L'originalité est que les musiciens du Concert Spirituel jouent Music for the Royal Fireworks de Haendel devant l'abbatiale en direct, sous la baguette de  ! Notons également qu'il a préparé lui-même, pour chaque concert du soir, un texte manuscrit de format A5 en français et en picard, notre chef parlant parfaitement cette langue régionale. Il a également demandé au jardinier de l'abbaye, M. Gérard Vasseur, de composer pour chaque soir un ou plusieurs bouquets avec des fleurs du jardin, et de les remettre lui-même aux musiciens. Toutes ces attentions créent un lien entre les festivaliers, qui, ravis, vont reprendre la route de retour.

Crédits photographiques : Messe à 40 voix, Les Surprises © DR ; Les Indes Galantes © ComdesImages-Teissedre ; son et lumière © DR

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