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Le Festival d’Automne célèbre William Forsythe

Premier rendez-vous du Portrait consacré au chorégraphe par le Festival d'Automne jusqu'en décembre, Limb's Theorem est une déflagration en trois actes dansée par les fantastiques danseurs du .

Créé en 1990, Limb's Theorem « inaugura » la résidence de création que et son Ballet de Francfurt honora chaque année au Théâtre du Châtelet jusqu'en 1998. L'excitation n'est aujourd'hui plus tout à fait la même qu'à l'orée de cette décennie hyper-créative en matière de danse contemporaine, où toutes les frontières du mouvement, du théâtre et de la danse elle-même semblaient céder les unes après les autres, à mesure que les frontières des ex-pays de l'Est s'ouvraient vers la liberté.

Bien sûr, depuis, d'autres chorégraphes ont tenté de nouvelles voies, expérimenté de nouveaux extrêmes, mais aucun n'a conservé cette constance que affiche encore aujourd'hui dans la recherche d'une autre écriture de la représentation chorégraphique. Limb's Theorem est l'une des pièces les plus emblématiques de cette période féconde. Construite en trois actes, c'est une pièce purement abstraite – pas de personnages, ni de narration au sens propre – mais qui laisse une place importante à la théâtralité, notamment dans sa partie centrale, voulue comme autonome « Ennemy in the figure », une forme de polar contemporain.

Le personnage principal en est le décor : un imposant plan incliné qui scinde la scène en deux au premier acte, un paravent ondulé au deuxième et différents panneaux au troisième. La lumière (d'énormes projecteurs balancés ou manipulés par les danseurs eux-mêmes) s'y reflète alternativement, laissant les interprètes la moitié du temps dans l'ombre. La musique enfin, signée Thom Willems, le complice habituel de Forsythe, qui rejaillit de déflagration en explosion, d'expérimentations sonores en nappes envahissantes.

Pour exister dans cet univers de bruit et de fureur, les danseurs doivent faire preuve d'une technique à toute épreuve et d'une très forte personnalité. C'est le cas avec le (en particulier les hommes) qui font feu de tout bois pour rebondir et jouer avec les contraintes du décor, de la lumière ou les diktats de la musique. Exigeante, toujours inattendue, poussée à son paroxysme en permanence, l'écriture de William Forsythe demande l'excellence à ses interprètes. Torsions, extensions, décalages, vitesse sont le dénominateur commun de ces figures subtilement répétées, enchaînées, dévidées.

Certes, avec les 24 ans de recul qu'offre cette reprise sur la scène du Théâtre du Châtelet, on décèle bien ça et là des gimmicks des années 90 : le goût pour le noir et blanc, les franges ou les pois, quelques citations intellectualisées de street dance ou de pop. Mais la pièce, fascinante de bout en bout, presque hypnotique, n'a absolument pas pris d'âge. Chaque mouvement est juste, précis, acéré. Les danseurs sont comme des planètes qui tournent sur leur orbite, jamais dérangés par les météorites ou les satellites qui encombreraient leur constellation. Du travail d'orfèvre avec la puissance du boxeur pour un spectacle dont on sort KO debout. Donné trois jours seulement à Paris, il sera repris du 4 au 6 décembre à la Maison des Arts de Créteil. Toutes les informations sur www.festival-automne.com

Crédit photographique : © Michel Cavalca

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