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Renaud Capuçon et Khatia Buniatishvili complices à Aix

et réunis en duo, cela ne pouvait qu'attirer une foule nombreuse au Grand Théâtre de Provence. Leur duo a enthousiasmé le public aixois par un magnifique récital.

A l'issu d'un magnifique programme, ces deux artistes ont permis de vérifier l'étendue de leur sensibilité musicale et ont affiché leur profonde affinité pour le registre de l'émotion pure. Sans chercher à forcer leur talent ni à « réinventer » la musique, ils ont su allier leurs différences afin qu'elles soient complémentaires. Sans même se chercher du regard, ils sont animés par le même souffle, avançant dans un même pas à travers des œuvres majeures du répertoire romantique pour violon et piano.

Les Quatre pièces romantiques de Dvorak sont des morceaux qui peuvent être joués séparément à l'image des Romances ou des Klavierstücke de Schumann. Le violoniste et la pianiste débutent ce concert sur une note presque intimiste. Le lyrisme vibrant du Guarneri, sa justesse d'intonation, répondent à une précision digitale dont les murmures résonnent à fleur de peau. Les différents volets sont tantôt d'une douceur enveloppante, tantôt incisifs, ou même d'une intensité langoureuse à l'image de l'Allegro appassionato qui semble étirer l'espace temps.

Changement de climat avec la Sonate pour violon et piano n° 3 de Grieg. Les ondulations tumultueuses dans l'Allegro Molto ed appassionato donne l'occasion d'apprécier le jeu incandescent de la géorgienne, notamment des basses magnifiques jamais pesantes, obligeant à hisser le volume sonore de son instrument et équilibrer les échanges. Les aigus cristallins de la Romance accentuent la délicatesse mélodique du texte. Ses éléments rapsodiques rappellent que cette musique puise sa source dans le folklore. Avec espièglerie, la virtuosité du final est portée par un sens de la narration visuellement parlant.

Après l'entracte, les deux complices nous offrent une lecture romantique et contrastée de la Sonate en la majeur de Franck avec sa part de mystère et ses touches impressionnistes. Cette poésie parfois automnale et crépusculaire évoque tour à tour une innocence retrouvée, une nostalgie d'un regard porté sur le passé mais aussi l'avenir. Toujours raffiné, use avec sensualité de son vibrato tandis que s'illustre par un jeu imagé et feutré dans les demi- teintes. Certains peuvent y voir un excès d'effets harmoniques et des phrasés trop brillants de part et d'autre. Pourtant, l'ensemble, équilibré, est séduisant jusqu'au poignant climax du dernier mouvement. Petite déception avec les deux bis offerts au public dont Liebsleid de Kreisler qui mettent avant tout le violon en avant et relègue le piano au rôle d'accompagnateur.

Crédit photographique : Jean-francois Leclercq

 

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