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Mozart, airs pour castrat avec Valer Sabadus

Le jeune contreténor roumain s'intéresse aux grands rôles de castrat composés par Mozart. Son charmant filet de voix en est-il pour autant compatible avec les exigences souhaitées ?

À l'époque où les hommages à tel ou tel castrat se multiplient – et lui-même a récemment publié un récital consacré au grand Giuseppe Millico –, il était tentant de se pencher sur la musique écrite par Mozart pour cette typologie vocale bien particulière. Depuis ses premières années en Italie, où il rencontra notamment le célèbre Venanzio Rauzzini, jusqu'à La Clémence de Titus de 1791, Mozart eut en effet tout au long de sa carrière l'occasion de composer pour un registre qu'il affectionnait tout particulièrement. Il eût été intéressant de se pencher dans le détail sur l'évolution de l'écriture vocale pour un registre de plus en plus contesté, et concurrencé dans les rôles de premier plan par la voix de ténor, autrefois confiné aux personnages secondaires ou aux rôles de caractère.

Hélas, le programme retenu pour ce très court CD, en réalité la bande-son d'un concert enregistré en direct, ne permet pas vraiment de se faire une idée particulière d'une quelconque évolution. Tout au plus la pochette signale-t-elle les principales caractéristiques vocales des artistes à qui ces airs étaient destinés. Plus gênant, le caractère lisse et inexpressif d'une interprétation fade et sans couleurs homogénéise tous ces airs au point d'en gommer leur identité vocale propre, pour ne pas parler de leur valeur dramatique, ici réduite à néant. Ce n'est pas que n'ait pas une jolie voix, ou même une technique accomplie. C'est tout simplement que l'absence de variété dans l'émotion et dans la coloration ôte tout intérêt à ces pages qui ne deviennent plus que prétextes à d'infinies et interminables vocalises. L'orchestre Recreation – Groβes Orchester Graz, sous la direction molle et plate de , n'est pas de nature à arranger les choses.

Paradoxe de ce CD, c'est dans le « Voi che sapete » de Chérubin, le seul air de ce programme à n'avoir pas été conçu pour un castrat, que le joli filet de Sabadus parvient enfin à exprimer quelque sentiment. Le cas Fagioli mis à part, l'adéquation de la voix de contreténor aux grands rôles de castrat reste à prouver.

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