Pour la troisième saison consécutive, le Châtelet accueille le L.A. Dance project, un collectif fondé par Benjamin Millepied. Ce dernier signe la meilleure pièce du programme composé de trois chorégraphies contemporaines.
Sidi Larbi Cherkaoui, invité à chorégraphier pour le L.A. Dance Project, s'est fortement inspiré de son expérience indienne pour écrire ce trio masculin Harbor Me. Excellents, les trois danseurs sont souples et sensuels, se coulant avec fluidité dans les propositions du chorégraphe. Le lien qui unit les danseurs est très tellurique, chacun incarnant un élément terrestre : l'eau, la terre ou le feu, interdépendants l'un de l'autre. Comme souvent chez Sidi Larbi Cherkaoui, cependant, le propos « new age » anesthésie un peu la portée du mouvement. Et la musique, confiée au coréen Woojae Park, a tendance à tout écraser.
Deux pour le prix d'un, c'est le résumé de la pièce suivante II acts for the blind qui propose deux fois la même chorégraphie de Roy Assaf, avec des effets forts différents. La première fois, elle est interprétée sans costumes et sans paroles, comme les vignettes d'une bande dessinée qui seraient sans bulles et sans couleur. La deuxième, elle illustrée par un texte hilarant et décalé dit par Charles Hodges, qui met des mots sur les actions absurdes de chacun des danseurs. Le tout raconte une historiette sans queue ni tête qui se déroule dans la Cité des Anges ! So what ?
Nettement plus convaincante est la pièce de Benjamin Millepied, Hearts and Arrow, qui livre le deuxième opus de sa trilogie sur les joyaux, en hommage à Balanchine. On admire chez ce chorégraphe installé depuis quelques mois à la tête du Ballet de l'Opéra de Paris, l'apparente facilité avec laquelle il crée des pièces qui suscitent une adhésion immédiate. C'est de la « feel good dance » : savoir-faire, dynamisme et vitalité, mais aussi rapidité et musicalité à chaque séquence. Comme un poisson dans l'eau avec ces interprètes qu'il a choisi et accompagné pendant plusieurs années, Benjamin Millepied se fait plaisir, réservant aux danseurs un feu d'artifice de sauts et de parcours enlevés. Le vocabulaire chorégraphique reste simple, sans inventivité gestuelle, avec parfois des imprécisions dans les ports de bras ou les épaulements, mais l'énergie de cette « danseuse américaine » de Benjamin Millepied est intacte. Et c'est ce qui compte !
Photo : © Marie-Noëlle Robert, Laurent Philippe