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La Philharmonie accueille le New York Philharmonic


En plein cœur de sa tournée européenne, le passait par Paris pour deux concerts au programme alléchant. Emmené par son chef titulaire l'orchestre produisit une splendide performance, peut-être la meilleure à Paris depuis qu'Alan Gilbert (lire l'entretien donné à ResMusica) en a pris les rênes.     

Défenseur de nombreuses œuvres nouvelles ou contemporaines, lança cette série de concert avec Nyx composé en 2010 par qui en fut également le créateur au Châtelet à la tête de l'Orchestre Philharmonique de Radio France. Écrite à la mode classique des poèmes symphoniques en vogue un siècle auparavant, on y perçoit un héritage straussien, des accents ravéliens, tout autant que l'influence de Stravinski. Et fort peu la modernité revendiquée par le XXème siècle avec cette écriture respectant la grammaire et la tonalité classique, jouant avec talent de toutes les ressources du grand orchestre. Elle ne fait sans doute pas avancer d'un pouce l'histoire de la musique mais elle est intelligemment construite, brillamment orchestrée et fait constamment plaisir à entendre. D'autant que l'orchestre s'y montra formidable, et déjà certains de ses solistes lumineux de talent tel dont la clarinette solo joue un rôle primordial dans cette pièce.

On resta au même niveau d'excellence orchestrale auquel s'ajouta la voix merveilleuse de chaleur et d'humanité de pour Shéhérazade de Ravel. Tout en nuance, le chant de la mezzo-soprano américaine transmettait l'émotion et la poésie du texte comme de la musique de Ravel, avec un accompagnement luxueux, attentif et délicatement ciselé du chef. Et cette fois comment ne pas citer et sa flûte solo d'une perfection rêvée de timbre et de phrasé, idéal dans son dialogue avec la chanteuse. En bis Morgen de Strauss conclut cette première partie comme dans un doux rêve.

Si la suite du programme flatta tout autant nos oreilles, il nous sembla que le style un peu lisse du chef uniformisait un peu trop son programme faisant sonner les valses de Ravel et son Strauss certes magnifiquement mais trop proches. S'il fit globalement mouche avec Ravel, rata quelque peu le coche avec une Suite du Chevalier à la rose trop uniformément brillante, en déficit d'esprit, d'humour, de second degré et surtout de sensualité, le début froidement speedé n'ayant qu'un lointain rapport avec l'extase charnelle qu'il est sensé illustrer. Enchaînant avec une Valse du Lac des cygnes un peu épaisse à nos oreilles, l'orchestre fit son tabac habituel avec son jazz band « cadeau des new yorkais pour la salle » nous annonça le chef, concluant cette première soirée avec le sourire.

Le second programme offrit les mêmes plaisirs et la même réserve. D'un côté une direction limpide, une mise en place irréprochable, un orchestre de très haut niveau, et toujours de formidables solistes avec, entre autre la fabuleuse trompette de qui fit merveille dans Petrouchka. De l'autre côté des climats trop lisses et uniformes. Ainsi l'humour de Petrouchka manquait à l'appel, même pas un sourire, les différents tableaux ne se différentiant finalement que par le tempo. Si Jeux de Debussy, juste un poil rapide par endroits, fila bien, le chef loupa son départ du Mandarin merveilleux sans attendre le silence pour le lancer (une faute à nos oreilles) et sans nous prendre à la gorge, ne transmettant aucun sentiment d'urgence, d'angoisse voire de terreur. Il ne réussira pas mieux sa fin qui doit nous terrifier et nous mettre en apnée, toute aussi lisse ce soir.

L'Ouverture d'Egmont offerte en bis, avec huit contrebasses, douze violoncelles et altos, seize seconds et dix-sept premiers violons ne manquait pas de volume, juste d'un peu de suspense. Ce déficit expressif restera le léger (voire plus selon les affinités de chacun) regret de ces deux concerts, où le plaisir des oreilles fut total, celui du cœur ou de l'âme pas toujours.

Crédit photographique : , © Chris Lee

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