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Superbe hommage à Marcel Dupré chez Mercury

Toute notre gratitude à l'Association des Amis de l'Art de (A.A.A.M.D.) grâce à laquelle nous devons enfin cette admirable réalisation tant attendue des mélomanes, et particulièrement des admirateurs du roi des instruments.

En s'attelant dans les années 90 à la mise en CD du prestigieux catalogue américain Mercury Living Presence, Wilma Cozart Fine (1927-2009) qui en était la productrice – ingénieur du son, s'est essentiellement consacrée aux enregistrements stéréo, mais pas tous : concernant les gravures de l'illustre organiste français (1886-1971), elle ne transféra que la légendaire version de la Symphonie n°3 en ut mineur op. 78 « avec orgue » de Saint-Saëns captée à Detroit en octobre 1957 avec la complicité de , la Pièce Héroïque et les Trois Chorals de Franck, ainsi que deux extraits de symphonies de Widor, pages pour orgue solo enregistrées peu après à l'orgue Aeolian-Skinner de l'église Saint Thomas de New York. Ces enregistrements font partie de l'Édition Collector volume 2 de Mercury Living Presence, respectivement aux CDs 44 et 21.

Si Wilma Cozart Fine ne daigna pas reporter en CD le reste des bandes à trois canaux de Dupré, c'est qu'elle les estimait problématiques et en mauvais état. Or son jugement est plutôt étonnant, car l'audition de ce coffret contenant l'intégralité des enregistrements de l'organiste nous les révèle, bien au contraire, absolument sidérants : on reste vraiment stupéfait de constater qu'ils concurrencent sans peine les meilleures captations d'orgue numériques actuelles. Le fameux procédé Plangent qui permet d'éviter tout pleurage d'une bande analogique en se verrouillant sur sa haute fréquence de prémagnétisation, tient ici du miracle, car on sait à quel point les enregistrements analogiques d'orgue sont particulièrement sensibles au pleurage.

Grâce à cette restitution totalement exhaustive, nous pouvons enfin obtenir en CD non seulement le reste des gravures réalisées par Dupré au superbe orgue Aeolian-Skinner de l'église Saint Thomas de New York, à savoir l'envoûtant Prélude et Fugue en sol mineur op. 7 n°3 et l'extraordinaire Triptyque op. 51 de Dupré compositeur, mais également tous les enregistrements accomplis entre le 3 et 11 juillet 1959 sur son instrument de cœur, les grandes orgues Cavaillé-Coll de Saint-Sulpice dont il fut titulaire de 1934 jusqu'à sa mort, y succédant ainsi à son maître Widor dont il était le suppléant. Et ce sont ainsi, se déployant pour notre plus grand bonheur musical, Préludes et Fugues, Fantaisies et les Six Chorals Schübler de Bach, aux côtés d'un florilège éblouissant de pages de Franck, Messiaen et bien sûr Dupré (avec entre autres les Trois Préludes et Fugues op. 36 et les célèbres Variations sur un Noël op. 20).

Et pour que cette édition soit totalement exhaustive, Universal, se souvenant des accords Mercury – Philips, y inclut les deux gravures Philips peut-être accomplies un peu tard en octobre 1965 à l'orgue Cavaillé-Coll de l'Abbaye Saint-Ouen à Rouen, l'une encore consacrée à des pages de Dupré (dont une extraordinaire Symphonie-Passion op. 23) et l'autre à des Chorals de Bach (Dupré était l'auteur de la célèbre édition intégrale annotée et doigtée de l'œuvre de Bach chez Bornemann).

avait d'excellentes relations avec l'équipe technique de Mercury, bien conscient des qualités sonores incomparables des résultats, et cela s'entend ; à l'époque de ces gravures, il était loin d'être un novice de l'enregistrement : dès 1926, alors plutôt réticent, il nous lègue des 78 tours chez His Master's Voice aux orgues de l'Alexander Palace et du Queen's Hall de Londres, puis en France chez Lumen dès 1934, d'ailleurs suivie au moment du microsillon d'une collaboration franco-américaine Lumen – Westminster. Mais les réalisations Mercury Living Presence constituent sans aucun doute l'apothéose artistique et technique de l'art suprême de Marcel Dupré.

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