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Le baryton Benjamin Appl à la Philharmonie

Suite de la série ECHO Rising Stars à la Philharmonie : après la pianiste Cathy Krier, le baryton .

De tous les jeunes musiciens qui, ces dernières années, se sont fait un nom en Europe, certains des plus intéressants (Khatia Buniatishvili, Jean-Frédéric Neuburger, le Quatuor Ardeo) ont été sélectionnés pour le programme ECHO Rising Stars. suivra-t-il le même chemin ? Et n'est-il pas trop tôt pour le dire, alors qu'il n'est qu'à la troisième étape d'une série de concerts qui le conduira dans une quinzaine de salles de concert européennes ? Sans doute pas. Que des accompagnateurs comme Malcolm Martineau et Graham Johnson enregistrent et jouent déjà avec lui, cela se comprend aisément quand on l'entend. La présence est chaleureuse, l'engagement constant. Sans faiblesse technique, montre un talent déjà affirmé et riche de promesses.

Il y a peu de chanteurs de son âge qui peuvent voir un cycle de mélodies écrit à leur intention par un compositeur reconnu. Le programme ECHO Rising Stars donne la chance aux jeunes artistes de créer une œuvre qui leur appartienne en propre. Benjamin Appl a donc proposé à quatre lettres écrites pendant la Grande Guerre et une strophe de Schiller extraite des « Dieux de la Grèce » (déjà mise en musique par Schubert). Même sous une forme ramassée (5 poèmes en 11 minutes) et de conception volontairement simple, The Last Letter flatte les qualités du jeune chanteur, lequel réussit à rendre l'émotion contenue dans des textes qui n'ont rien de littéraire. Pour la première partie du programme, c'est avec une juvénile assurance qu'il s'attaque à deux lieder particulièrement difficiles de Schumann (« Mein Wagen rollet langsam » et Belsatzar) avant « le » cycle entre tous, les Amours du poète. L'impression est celle d'un interprète très accompli, du moins en ce qui concerne la musicalité. De ces lieder, où l'on apprécie le superbe timbre du baryton et l'excellente technique du pianiste , les deux jeunes musiciens donnent une lecture plutôt fouillée et toujours vivante, aux nuances bien graduées (la montée en puissance du « Ich grolle nicht »), et aux options tranchées, quoique discutables (tempos plutôt rapides, notamment « Am leuchtenden Sommermorgen » et l'accélération du postlude de « Ein Jüngling liebt ein Mädchen »). Il leur reste à gagner ce ton intime et ce naturel qui donneront à toutes leurs intentions la complète efficacité et la force poétique des grands liedersänger et de leurs accompagnateurs.

Mais la mélodie française, n'est-ce pas encore un autre défi ? L'élégance de la prosodie chez Duparc et la canaillerie de celle de Poulenc ne réclament-elles pas un art indéfinissable qui se refuse obstinément aux chanteurs étrangers ? Quelques erreurs de texte n'empêchent pas une interprétation très honorable, bien chantée et bien prononcée, d'une sobriété appréciable. Une future star, peut-être, un artiste à suivre, certainement.

Crédits photographiques : Benjamin Appl © David Jerusalem

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