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Pappano et Lisiecki dans Schumann

Presque 21 ans et fait déjà partie des pianistes prometteurs de la jeune génération. Sa forte personnalité et sa solide technique sont autant d'atouts qui lui ont permis d'accéder à une carrière internationale. Pour son 3e disque chez Deutsche Grammophon, il a choisi Schumann et ses œuvres pour piano et orchestre.

De nombreux éléments séduisent dès la première écoute du concerto: musicalité de premier plan, le canadien insuffle une vitalité fougueuse à la partition. L'entente avec est ici constante. Sa direction homogène suit les intentions du pianiste et met à l'honneur les bois particulièrement en verve. L'orchestre rutile, les élans sont tour à tour tendres (Allegro Affettuoso) et empreints de fraîcheur jubilatoire (Allegro vivace) mais cela reste trop lisse pour réellement nous emporter. Tout un ensemble de nuances est malheureusement absent du tableau à l'image de la cadence de l'Allegro sans aucune amplitude ni variété de dynamiques. Les descentes en accords détachés sonnent de façon martiale et répétitive sans parvenir à relancer le discours.
L'écriture de Schumann est truffée de pièges et demande notamment une flexibilité expressive. Le soliste se retrouve dans un rapport presque instinctif et animal, à l'affut de ce qui se trame entre les différents pupitres. Rien de tout cela ici. Dans l'Intermezzo, l'expression est délicate mais davantage de corps côté soliste permettrait l'urgence de jeu attendue avec l'arrivé du deuxième thème. La prise de son avantage sensiblement l'orchestre et place parfois le piano en retrait.

Rarement entendue, l'Introduction et Allegro appassionato op.92, laisse entendre une interprétation virtuose « à l'énergie » mais aussi des parties plus légères et contrastées usant de son toucher délié. Dans l'Introduction et Allegro de concert op.134, on retrouve un jeu impétueux de part et d'autre mais à force de trop de vouloir personnaliser le texte, on s'éloigne de ce qui est écrit. La première entrée par exemple de Lisiecki se veut poétique et intériorisée mais le phrasé reste plat car il n'y a pas les nuances telles qu'elles sont indiquées. Esthétiquement, c'est joli mais ce n'est pas vraiment ce qu'a voulu Schumann.
Au final, il s'agit d'un couplage intéressant qui nous permet de redécouvrir des pièces oubliées du répertoire schumannien. Cette version du concerto ne démérite pas mais une esthétique moins prévisible et une vision d'ensemble plus aboutie lui aurait permis de se positionner aux côtés des très nombreuses références du genre.

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