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FLA.CO.MEN ou l’art du flamenco selon Israel Galván

Avec FLA.CO.MEN, Israel Galván déroute. Il manie l’humour et l’auto-dérision, s’aventure parfois sur les rives du burlesque, malmène le flamenco traditionnel. Toutefois, l’humour sied peu au flamenco dont la beauté est intimement liée au tragique de la musique répercuté dans la danse.

L’homme est seul sur scène. Il apparaît, la salle toujours éclairée, vêtu d’un tablier blanc de cuisinière. Il commence à tourner les pages d’une partition, s’exprime en espagnol. Ses mots sont traduits au fur et à mesure par une des musiciennes assise un peu en retrait. Il danse en même temps, et la virtuosité de ses pieds frappant le sol – le fameux zapateado – montre avec quelle aisance Galván domine la technique flamenca.

A l’admiration devant la virtuosité brillante et fugace succède la lassitude provoquée par des sketches sans grande originalité.

Seulement, les moments sont rares où l’artiste sévillan donne toute la mesure de son talent. Il préfère déconstruire ou « revisiter » le flamenco selon l’expression consacrée. Déconstruire, certes, mais cela n’a de sens que pour poser de nouvelles fondations. Or ici la déconstruction se limite bien souvent à tourner en dérision le décorum du flamenco traditionnel; de reconstruction et de réinvention, point. Le renouvellement ne passe que par les gags, les accessoires et l’accompagnement musical. Danser sur des pièces de monnaie. Plonger la salle dans le noir et dans le silence pendant de longues secondes. Monter dans les gradins en marquant un tempo par des claquements de mains qui n’ont visiblement pas pour objectif d’être reproduits par le public. Déclamer de longues tirades en espagnol sous-titré. L’humour passe aussi par le jeu entre un chanteur qui intime à Galván l’ordre de s’arrêter par de vigoureux « Parate ! » restant sans aucun effet sur le danseur qui danse, pirouette et saute de plus belle. Trop longue, cette scène qui utilise les ressorts du comique de répétition finit par ennuyer. L’originalité de FLA.CO.MEN ne réside pas tant dans la chorégraphie que dans tout ce qui l’entoure et lui est extérieur.

Galván, parfois, danse dans le silence, parfois accompagné par les seules percussions; à d’autres moments, le flamenco s’emballe sur des airs jazzy ou, au contraire, renoue avec la tradition des improvisations chantées a cappella par des voies rauques et vibrantes. Le talent des musiciens, qui participent pleinement au spectacle, est à saluer.

Mais l’ensemble reste décousu. L’intensité du flamenco se perd dans le registre de l’humour, sans parvenir à capter le spectateur de bout en bout.

Malgré des passages drôles et une virtuosité qui peut être magistrale comme dans le solo improvisé en-dehors de la scène devant la première rangée de spectateurs, l’impression générale est celle d’un spectacle qui manque de profondeur et où l’émotion n’est pas au rendez-vous.

Crédit photographique : (c) Hugo Gumiel

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