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La bataille de Muret selon Patrick Burgan

Âpre et sanguinaire fut la croisade des Albigeois qui contribua, entre autres malheurs, à chasser les troubadours qui étaient au service des seigneurs cathares. Il revenait au compositeur occitan de célébrer la Bataille de Muret, avec les forces du terroir (chœurs et Sacqueboutiers de Toulouse) et le récit en langue d'oc dont il fait lui-même la traduction française.

Riche idée que de faire entendre l'une et l'autre langue dans un canon perpétuel, et Pierre-Yves Binard magnifiques faisant revivre la bataille à travers les six laisses extraites de La Chanson de la croisade albigeoise. Le poème épique a été écrit juste après l'événement par un troubadour resté anonyme qui prend fait et cause pour les Toulousains. Il déplore notamment la mort du roi d'Aragon sauvagement tué par les troupes de Simon de Montfort alors qu'il venait prêter main forte aux Toulousains. Autant de suggestions sonores et expressives pour le compositeur qui fait appel aux instruments d'époque – cornet guerrier, sacqueboute funèbre et autres anches doubles très sonores – et au chœur mixte sans paroles donnant une dimension orchestrale à cette épopée. Si la percussion souvent bruitée nous met au cœur du combat, l'impact des vents et la rugosité des textures lui confèrent son intensité tragique. Passent également dans les parties du chœur et dans l'écriture instrumentale des « timbres » moyenâgeux comme la chanson guerrière de L'homme armé. La belle sonorité de la sacqueboute dans Le deuil, cinquième et dernier tableau, emprunte les mélismes lents d'une teneur grégorienne avant le superbe thrène polyphonique des voix soutenues par les instruments. Sous la résonance des cloches tubes et dans une plénitude micropolyphonique, la clameur finale est saisissante.

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