- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Addictif Oiseau de feu

Stravinsky écrivit son conte dansé, L'Oiseau de feu, d'après un récit national russe, en 1909. La création se déroula à l'Opéra de Paris le 25 juin 1910 avec la compagnie des Ballets russes et une chorégraphie de . Gabriel Pierné assura la direction musicale de cette première commande de Diaghilev au prometteur musicien.

Immédiatement L'Oiseau de feu rencontra un fantastique succès public et critique lançant la carrière du jeune compositeur. Ce chef-d'œuvre appartient encore à la période postromantique du compositeur. On y repère des influences rappelant les deux immenses orchestrateurs que furent Richard Strauss et Nicolaï Rimski-Korsakov, mais pas uniquement puisque sur le plan harmonique, plus moderne, on pense à Scriabine et Debussy. L'œuvre de Stravinsky se positionne à un moment charnière de son évolution esthétique, moment de synthèse magistrale de la musique de la fin du XIXe siècle et d'ébauche d'innovations qui trouveront leur plein emploi un peu plus tard. Il nous faut insister sur l'inspiration authentique qui trouva à s'exacerber dans un chromatisme exubérant, envahissant, et une liberté rythmique encore contenue, sauf dans la « Danse infernale du roi Kaschtchéi » qui anticipe le Sacre du printemps qui sera créé trois ans plus tard, mais sans renoncement vis-à-vis de l'écriture.

Presque chacune des 22 sections de cette version orchestrale révèle l'originalité et la richesse de sa démarche créatrice. L'argument, magnifiquement illustré par l'expressivité inventive de la musique, ne lui est pas indispensable, la partition s'apparente alors à un poème symphonique. Toujours est-il que Stravinsky en tira trois suites d'orchestre (1911, 1919 et 1945). Robert Siohan (Stravinsky, Solfèges, Seuil, 1959) écrivait : « La partition de L'Oiseau de feu est ainsi comparable à une somptueuse étoffe brodée d'or aux couleurs chatoyantes ». L'écoute de deux sections contrastées, « Berceuse » et la « Disparition du palais » par exemple, illustre justement ce propos. Denis Russell Davies retrouve tout le suc de cette savoureuse musique avec sa phalange bâloise au meilleur de sa forme. On lui doit aussi une transcription pour piano à quatre mains jouée avec la japonaise sans parvenir toutefois à renouveler la magie de la version orchestrale.

(Visited 1 017 times, 1 visits today)