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Création de Mabinogion d’Arthur Lestrange et Frédéric Aurier

Il y avait au moins deux bonnes raisons de se rendre ce vendredi soir à La Marbrerie, ancien local industriel de Montreuil désormais voué à la production et la diffusion artistiques.

C'était d'une part l'inauguration de la salle de spectacle refaite à neuf, avec sa grande charpente de bois et son espace chaleureux augmenté d'une mezzanine. Y était donné, d'autre part, dans le cadre du Festival d'Île de France et en création mondiale, Mabinogion, un conte musical empruntant à la tradition galloise, écrit par le franco-gallois Arthur Lestrange et dont le compositeur et violoniste (sur scène au sein du ) a conçu la partie musicale.

Surprise, suspens et séduction

Le dispositif est des plus simples. À jardin, Élise Caron est devant son micro pour nous raconter comment les Mabinogion se sont fait un nom, à travers un récit étrange autant que drôle, bien ficelé par son auteur qui invite sans arrêt l'écouteur à gravir « le monticule » : « Qui montera dessus ne sera pas déçu »… Les Béla occupent le centre de la scène, cordes et archets déployés pour soutenir et répercuter l'histoire, donnant leur résonance aux mots de la diseuse. Cette dernière, endossant de manière très virtuose le rôle et la voix de ses personnages, ne fait d'ailleurs pas que raconter. Musicienne, performeuse et compositrice elle-même, Élise Caron joue de la flûte avec le quatuor et se met bien souvent à chanter avec lui, des refrains populaires qui lui viennent aux lèvres au fil du récit. En solo parfois, elle fait de courtes improvisations où la voix tendue, exprimant toute l'énergie du corps, se fait l'écho d'un chant plus profond.

S'il n'a pas puisé aux sources de la tradition galloise qu'il dit ne pas connaître, s'est laissé porter par son imaginaire pour réinventer « la langue, la prosodie, le rythme et le vocabulaire musical » confie-t-il dans les notes de programme. Très actifs et solidaires de ce qui est dit, les musiciens, donnant eux aussi de la voix, assument une certaine dimension théâtrale du récit, par leur geste instrumental souvent extraverti et en suscitant un univers bruité obtenu par une multiplicité de modes de jeu non traditionnels. Dans l'une des séquences les plus cruelles et sanguinaires du conte, le halo de résonance fantasmagorique obtenu par des petits archets courbes, permettant de mettre en vibration les quatre cordes en même temps, nous fait soudainement basculer dans un monde onirique et troublant. Un rien complexe et long pour les petits (60 minutes), le spectacle porté par les talents d'Élise Caron et du a enchanté moyens et grands !

Crédit photographique : (c) Festival d'Ile de France

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