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Coffret hommage à Giuseppe Sinopoli

En plus de fournir de splendides versions de la Symphonie n°4 de Schumann et d'Ein Heldenleben de , cette édition présente de belles compositions du maître dirigées par lui-même, Sylvain Cambreling et Peter Ruzicka.

Comme d'autres avant lui, Sinopoli était avant tout un chef de concert. La redécouverte, déjà chez Hänssler, d'un live de la 9e de Mahler enregistrée quelques mois avant sa mort avait fait comprendre que les gravures studios laissées pour Deutsche Grammophon et Teldec n'étaient pas à la hauteur des meilleures prestations de l'artiste. C'est à nouveau le cas avec la parution de cette compilation, volume 35 de l'Édition Staatskapelle Dresden du label Profil Hännsler.

Dès l'Ouverture d'Oberon, tirée d'un live de 1998 à la Semperoper, le staccato des cordes montre une vraie capacité du chef à porter l'orchestre et à lui donner vivacité et force, là où dans les enregistrements DG il manque souvent du mordant et un soutien par en-dessous de l'ensemble. Puis vient Ein Heldenleben, enregistré dans la même salle en janvier 2001, trois mois avant sa mort. Ici encore la comparaison avec la version DG fait très nettement pencher vers cette nouvelle proposition, pleine de violence, de nostalgie et de questionnements, portée par un fantastique premier violon – Kai Vogler – et par des contrebasses toujours très présentes, d'autant qu'elles sont mises en avant par la prise de son. A la 23e minutes du poème, l'explosion de la scène du Champs de Bataille après les sublimes minutes de latences de la Certitude de la Victoire montre à quel point Sinopoli pouvait développer la puissance de son orchestre, et hisse cette version parmi les références, devant Kempe en live sorti au volume 28 dans la même collection, et à côté de Böhm avec Dresde (DG) et surtout Vienne (DG/Import Japon).

Tiré du même concert qu'Oberon, l'Ouverture de Rienzi ravit elle aussi, même si le discours du chef jouant toujours sur des jeux de couleurs et de brillance attire moins. Dans le second CD du coffret, l'Orpheus de Liszt issu du même concert fait peut-être figure de nouvelle référence, tant la finesse et le cristallin des cordes et des harpes de l'orchestre saxon sont utilisés avec magie par Sinopoli. Puis une Symphonie n°4 de tirée de l'un des premiers concerts du maestro en tant que directeur musical de Dresde, en 1993, montre à nouveau la capacité du chef à soutenir l'orchestre et le flux musical par de magnifiques crescendos, tout en insufflant au besoin densité ou légèreté à la masse.

Chef reconnu internationalement pendant plus de vingt ans, ce défenseur de musique contemporaine et tout particulièrement de Bruno Maderna était aussi compositeur. Des trois œuvres présentées ici, une seule aura été dirigée par lui, en 1994, un Hommage à Constanzo Porta de 4'44'' qui ressemble largement au Prélude du Palestrina de Pfitzner dans son traitement symphonique de « motet libéré » (sic). La troisième partie du Tombeau d'Armor, d'une vingtaine de minutes, présentée ensuite par Peter Bruns au violoncelle et Sylvain Cambreling, convainc plus en termes de personnalité, même si l'influence de Varèse et surtout de Lutoslawski y est flagrante. La dernière pièce, dirigée lors d'un concert hommage à Sinopoli trois ans après sa crise cardiaque en pleine représentation d'Aïda à Berlin, est maîtrisée avec brio par Peter Ruzicka.

Très intéressant pour approfondir ses connaissances sur ce grand chef du XXe siècle et ouvrir un regard sur le musicien global, ce coffret vaut encore plus pour l'interprétation d'Heldeleben, à connaître de tous les passionnées de , ainsi que pour ceux qui souhaiteraient posséder une excellente version d'Orpheus de Liszt ou de la dernière symphonie de Schumann.

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